Mafia Inc : il sacro famiglia! ‎★‎★‎★1/2

Tout un projet ambitieux que ce Mafia Inc. distribué par Les Films Séville! À l’affiche depuis hier dans plus de 95 salles au Québec, ce film de gangsters librement inspiré du livre Mafia inc. Grandeur et misère du clan sicilien au Québec d’André Cédilot et André Noël qui relate la dominance du clan Rizzuto à Montréal marque la sixième réalisation cinématographique de Podz (Les sept jours du Talion, L’affaire Dumont, King Dave). Ce long-métrage de plus de 135 minutes possède les moyens de ses ambitions au niveau esthétique, les perd parfois dans les longueurs du scénario mais offre au final un divertissement prenant et haletant.

1980. Menteur et manipulateur pathologique, Frank Paternò (Sergio Castellitto) règne sur le crime organisé de Montréal. Il règle les problèmes à coup de meurtres et de coups montés avec un détachement et une transparente colère qui forcent l’admiration de Vincent  »Vince » Gamache (Marc-André Grondin) qui le connaît grâce à la boutique de son père (Gilbert Sicotte). En conflit avec ses parents, Vince vient à considérer Paternò comme son véritable paternel et se valorise en commettant des tâches illégales pour lui. En 1994, Gamache, voulant encore et toujours impressionner Frank, se perd dans ses capacités et cause beaucoup de trouble. Trop de trouble…

Ce qui frappe d’entrée de jeu en visionnant Mafia Inc., c’est de constater à quel point le budget de 8,5 millions paraît à l’écran. Les décors clinquants et kitsch qui représentaient le raffinement en 1994 sont crédibles à tous points de vue. La remarquable direction photo réserve des moments de pure beauté et d’émotions. Les explosions et autres cascades n’ont rien à envier aux blockbusters américains. La distribution imposante comprenant plus de 50 rôles parlants brille dans toutes les scènes. La caméra respire. On s’imprègne sans peine à l’atmosphère des lieux, que ce soit un abattoir glauque ou une boutique vintage de tailleurs pour homme. Ça fait du bien de voir que le cinéma québécois peut produire un genre bien établi et réputé ailleurs avec la même qualité tout en demeurant fidèle à ses propres valeurs et actualité.

Mafia Inc. démontre comment la mafia a toujours fait partie des annales du Québec. L’oeuvre montre sans complaisance ses dessous mystérieux, inquiétants et fascinants. Mafia Inc. s’inscrit dans la lignée des traditionnels films de gangsters à l’italienne :  de la corruption, de la vengeance, des repas copieux qui font saliver, l’expansion d’un réseau illégal improbablement bien structuré, de la tricherie, des relations amoureuses tumultueuses, des dépendances à l’argent, l’importance de ne pas déroger à un code d’honneur aux morales défaillantes et être constamment présent pour sa famille malgré les trahisons. Ces thèmes se chevauchent fluidement malgré des temps morts et quelques confusions dans les intrigues imaginées par Sylvain Guy (Louis Cyr-L’homme le plus fort au monde). Il est parfois difficile, pour des non-initiés au genre, de comprendre toutes les ficelles entre les nombreux personnages.

Fidèle à son style, Podz propose des images d’une violence poignante mais nécessaire pour que les émotions s’y dégagent et se plongent avec vérité jusque dans l’âme des spectateurs. Le mélange de scènes silencieuses et d’autres bonifiées par l’envoûtante trame sonore de Milk & Bone s’avère dynamique et intriguant malgré quelques ruptures de ton. Dans le rôle du parrain de la mafia montréalaise, Sergio Castellitto offre une performance impeccable. On le déteste et on le trouve agréable dans la même seconde! Son sourire ravageur et son regard diabolique donnent froid dans le dos. Marc-André Grondin a magnifiquement cerné la psychologie complexe de Vince. Sa performance n’excuse jamais les gestes du personnage. Il l’incarne avec un abandon qui happe le public.

Truffé de références à des classiques du cinéma de gangster (Le Parrain, Goodfellas), le film saura plaire aux amateurs du genre et amuser ceux qui y sont moins habitués grâce à un humour cinglant, des scènes familiales touchantes et une finale sarcastique absolument délicieuse.

 

Crédits Photos : Les Films Séville