Parasite : premier de classe

Loin d’être systématiquement gage de succès dans les remises de prix cinématographiques à l’international, la Palme d’Or, remise cette année à Parasite , risque cette fois-ci de ne pas être la première victoire d’une longue lignée. Affichant maintenant plus d’un million de recettes au box-office canadien, ce film réalisé par Bong Joon-Ho (Snowpiercer, Okja) ne cesse d’accumuler les éloges auprès des critiques. Tellement qu’on en vient à se demander ce qu’il reste bien à dire sur ce chef d’oeuvre qui n’a pas encore été dit…À bien y penser, peut-être rien, mais ça fait un bien fou de vanter ses mérites et d’inciter bien humblement plus de cinéphiles à déguster cette fable moderne sur les classes sociales.

La prémisse s’avère bien simple. Puisqu’ils sont tous sans emploi, le père, la mère et les deux jeunes adultes d’une famille coréenne essaient par tous les moyens de sauver de l’argent, mais le découragement les accable de plus en plus dramatiquement. Par un heureux concours de circonstance, un des membres décroche un job de tutorat en anglais dans une famille extrêmement aisée. Il parvient à trouver un poste pour toute sa famille qui s’immisce dangereusement chez leurs employeurs au point de se demander qui sont les vrais parasites dans l’histoire…

La principale force du film réside dans sa maîtrise du mélange des genres. Drame psychologique, parodie, suspense, horreur…tout se fusionne avec un naturel remarquable et une constante cohérence qui laisse le spectateur pantois et délicieusement à bout de souffle. Impossible d’anticiper les dénouements des nombreuses intrigues. Le public se fait fréquemment surprendre sans s’en rendre véritablement compte.

Le départ  est truffé de répliques hilarantes, principalement car elles ne cherchent pas à l’être forcément et que les acteurs les incarnent avec un abandon simple et jouissif. Nous avons donc d’abord l’impression de rencontrer la version coréenne de la famille Bougon avec un malin plaisir. Par contre,  Bong Joon-Ho s’éloigne rapidement des petits tours de passe-passe loufoques et vulgaires auxquels nous avait habitué Paul Bougon (Rémy Girard) et sa bande pour privilégier un ton plus inquiétant, raffiné et glauque.

Pour aborder les préjugés, les contradictions et les injustices séparant les riches et les pauvres dans une société capitaliste privilégiant les biens aux valeurs humaines, Joon-Ho, appuyé par une direction de la photographie spectaculaire et d’une élégance rare,  utilise des métaphores fortes à la poésie aussi délicate que intense. Sans assommer le récit de morales et de réponses lourdes, le cinéaste provoque pendant plus de deux heures des questionnements et prises de conscience qui restent gravés en mémoire longtemps tout en nous divertissant follement et avec originalité. Un autre exploit de Joon-Ho est, par le fait même, de nous rendre tous les personnages, même les plus antipathiques et condescendants, attachants car on se reconnait dans leurs valeurs familiales autant nobles que déficientes. Qui plus est, les acteurs les interprètent avec aplomb et intelligence.

Parasite est encore à l’affiche dans quelques cinémas du Québec en version française ou en version originale avec des sous-titres français. Vous pouvez consulter les horaires ici.

Crédits Photos :MK2│Mile End

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