La daronne : pour Isabelle Huppert ★★1/2

Adapté du roman du même nom de Hannelore Cayre paru en 2017, La Daronne, à l’affiche au Québec dès aujourd’hui, symbolise le retour à la comédie du réalisateur Jean-Paul Salomé après plus de 6 ans d’absence. Pour marquer le coup, le cinéaste s’associe à la populaire et acclamée actrice Isabelle Huppert qui, à l’instar du personnage qu’elle personnifie, souhaitait prendre une pause de son registre de prédilection, le drame. Heureusement qu’elle est la tête d’affiche, car sa performance étincelante constitue l’élément le plus positivement marquant du long-métrage.

Isabelle Huppert incarne donc Patience Portefeux, une traductrice travaillant pour la police qui mène une bien rangée. Un peu trop à son goût. Veuve et mère de filles devenues des femmes accomplies, elle désire mettre du piquant dans son existence terne. Par un concours de circonstances, elle y parvient en se transformant en une baronne de la drogue rapidement recherchée et redoutée.

Comme Patience met à profit son expertise policière, il est fascinant de voir quels stratagèmes elle utilise pour éviter de tomber dans les pièges. Avec son sens du contrôle et sa joie de vivre retrouvée, elle donne l’impression que ce  »changement de carrière » était le meilleur qu’elle pouvait espérer et on lui souhaite même que ça persiste malgré les risques encourus. Malheureusement, malgré ce filon extrêmement riche, l’œuvre ne cible jamais le ton juste entre comédie grinçante et suspense haletant.

Même si l’idée de faire une comédie à propos d’un sujet aussi délicat que le marché de la drogue, les blagues faussement sarcastiques se terminant bien souvent en jeux de mots et stéréotypes bas de gamme diluent les tensions insoutenables que ce thème doit inévitablement engendrées en parallèle. Par moments, le fléau de la drogue semble être ridiculisé au lieu d’être illustré de manière franche et actuelle. Heureusement, le film réussit à susciter quelques réflexions et à émettre certaines critiques sociales pertinentes, voire même touchantes en ce qui a trait à la solitude, aux effets pervers de la monotonie, au deuil et à l’essor tant attendu des femmes dans des métiers injustement réservés presque entièrement aux hommes.

Isabelle Huppert se démène admirablement dans cette double vie. Ce que le scénario omet de véhiculer en intensité, l’actrice le compense par sa transformation irrésistible. Ses petits sourires confiants qui masquent un profond désespoir rendent sa Prudence attachante d’emblée mais si elle commet et pense des choses atroces. Sa savoureuse ironie n’a pas besoin d’une réplique fade pour provoquer une réaction ; un soupir d’étonnement suffit. Son regard malicieux et sa fragilité sous-jacente donnent froid dans le dos. De même que le revirement final du jeu romantique du chat et de la souris qu’elle livre à un de ses collègues.

Ce film a été vu dans le cadre du Festival Cinémania.

2.5