Entre la fin des Jeux Olympiques de Tokyo qui a permis au Canada de ramasser un record de 24 médailles dans une édition non boycottée et le retour à l’automne de nos séries d’ici préférées, ICI TOU.TV propose une nouvelle série à se mettre sous la dent (jeu de mots pleinement assumé en référence à l’entreprise d’un des personnages de la série).
Disponible dans la section Extra depuis le 12 août, Un lien familial comporte six épisodes de 60 minutes et est librement inspirée du roman à succès du même nom de Nadine Bismuth qui signe également le scénario et les dialogues de cette rafraichissante série qui dépeint avec un brillant ton doux-amer le quotidien des couples d’aujourd’hui et l’énorme pression entraînée par l’impossible quête vers la perfection.
Je quitte, mais je ne te quitte pas…Si on devait résumer en une phrase cette série produite par Les Productions Also appartenant à Alexis Durand-Brault et à Sophie Lorain (qui réalise également la série), on pourrait aisément se servir de cet extrait de la chanson Je quitte écrite par Charlotte Cardin dont la musicographie compose par ailleurs presque entièrement la trame sonore de la série. Un choix hautement judicieux, car l’atmosphère mélancolique des mélodies électros de l’artiste ainsi que ses paroles sur la désillusion de l’amour correspondent parfaitement au style d’Un lien familial.
Un lien familial suit les tribulations de Magalie Rivard (Rachel Graton), une designer de cuisines de luxe associée à Isabelle Borduas (Noémie O’Farrell), une influenceuse qui connaît un succès monstre en partageant ses recettes raffinées et santé. Magalie a toutes les raisons de croire que son chum, le talentueux avocat Mathieu Massé (Pierre-Yves Cardinal), a une aventure avec une collègue de son cabinet, la déterminée Sophie (Virginie Ranger-Beauregard) qui lance à son amant un dernier ultimatum pour qu’il laisse enfin sa blonde avant Noël. Ne sachant comment réagir face aux crises vécues dans son couple, Magalie garde le silence et préserve tant bien que mal les apparences pour sa fille de cinq ans, Charlotte.
Or, l’existence de Magalie est chamboulée lors d’un repas familial que sa mère Monique (Chantal Fontaine) a organisé pour présenter à tous son nouveau copain André (Jacques L’Heureux). Elle y fait la rencontre de Guillaume (Maxime Allard), le fils célibataire de Jacques et père de Julienne (Anne Florence Lavigne Desjardins), une adolescente pour le moins dégourdie mais troublée par le divorce de ses parents qui l’empêche de s’épanouir comme elle l’entend.
Le coup de foudre est instantané pour Guillaume qui, sur un coup de tête, demandera à Magalie de rénover de fond en comble sa cuisine afin de la voir plus régulièrement. Parallèlement à ces travaux extrêmement coûteux et aux avances agaçantes de sa voisine Nancy (Julie Ringuette), Guillaume doit jongler avec ses obligations professionnelles qui le somme d’enquêter sur la mystérieuse disparition d’Annabelle Juneau, une mère de famille sans histoire qui n’a plus donné signe de vie depuis une visite dans un centre commercial.
En adaptant sa propre œuvre pour la télévision, Nadine Bismuth, tout en respectant la trame narrative et la conclusion de son roman, se permet de donner vie aux personnages secondaires qui, sur papier, n’existent que dans les perceptions de Magalie et Guillaume. Cette nouvelle exploration donne lieu à des répliques mordantes et savoureuses. Les préoccupations des personnages et leurs réactions face à certains drames sont parfaitement cohérentes avec ce qu’on s’imagine des couples de la trentaine d’aujourd’hui qui ne croient pas au modèle familial qu’ils ont connu pendant leur enfance. Un modèle qui, même si loin d’être parfait, semble plus simple que celui qui régit actuellement…
Les spectateurs sont poussés à réfléchir et à remettre en question sans complaisance sur les valeurs et les diktats utopiques imposés à cette génération qui se doit de concilier harmonieusement amour, travail et famille tout en adoptant un mode de vie sain et éthique ET en rénovant sa cuisine aux deux ou trois ans question de demeurer au fait des tendances, sinon elle échoue socialement. Pour exprimer efficacement l’anxiété que provoque cette réalité anxiogène et cette obligation de rester un couple pour les enfants, Sophie Lorain prend bien le temps de s’immiscer dans la tête des personnages grâce à des silences évocateurs croqués dans le quotidien entre une brasée de lavage et une importante réunion au bureau.
La réalisation de l’actrice s’avère dynamique et actuelle tout en ayant un aspect nostalgique. Même si les rapports amoureux des protagonistes sont complexes, ceux-ci ne peuvent s’empêcher de rêver aux contes de fées et aux papillons dans le ventre même s’ils savent pertinemment qu’ils sont temporaires. Le travail de Lorain à la caméra illustre à merveille ce romantisme rose bonbon teinté d’une sensualité subjective et magnétique. Un lien familial donne envie malgré tout de tomber amoureux et de croire à un bonheur absolu.
Même si les sujets abordés sont délicats, Un lien familial ne verse jamais dans le mélodrame. La série conserve un ton léger et réaliste qui permet aux téléspectateurs de se divertir. On a qu’à penser à cette amusante scène où Monique est à l’épicerie et tente désespérément de trouver les ingrédients pour une recette de brownies aux patates douces.
Rachel Graton fait preuve d’une belle retenue, une retenue qui éclate lors des deux derniers épisodes et qui donnent lieu à des scènes poignantes de vérité. Dans la peau de l’amoureux naïf qui achète des foulards et des vins hors de prix pour séduire, Maxime Allard fait sourire et fend le cœur en même temps. Pierre-Yves Cardinal est fort convaincant dans la peau d’un homme tellement manipulateur et imbu de lui-même qu’il croit ses propres manigances. Dans la peau d’une adolescente typique, Anne Florence Lavigne-Desjardins est une vraie révélation. Les fans de la série seront heureux d’apprendre que Nadine Bismuth ne ferme pas la porte à une suite…
Crédits Photos : Yan Turcotte et Marlène Gélineau Payette