La troisième saison de Victor Lessard intitulée Ghetto X est disponible depuis quelques semaines sur le Club Illico. Scénarisés par Martin Michaud alors qu’il écrivait en même temps un roman traitant du même sujet, les dix nouveaux épisodes ne suivent pas la même trajectoire que les saison précédentes. Profitant du fait que les spectateurs connaissent bien les traits de personnalité des personnages principaux et qu’ils sont attachés, la série se permet d’aller plus loin dans l’exploration de la sensibilité et de la vulnérabilité des protagonistes. Bien des secrets, notamment la vérité sur le passé trouble de Victor, seront enfin dévoilés. Victor Lessard ose également s’aventurer dans un terrain assez glissant pour une dramatique policière : dévoiler dès les premiers instants le meurtrier pour ensuite laisser planer le mystère sur les raisons de son geste. Lors du dévoilement de la saison, nous avons pu en discuter avec les interprètes de Victor Lessard et Jacinthe Taillon, Patrice Robitaille et Julie Le Breton.
Après trois saisons à jouer le même personnage, est-ce qu’il y a un danger de devenir trop confortable avec lui ?
PR : Non, pas du tout ! La question est bonne mais, non, je pense pas. Troisième saison, nouveau réalisateur, donc c’est comme un regard frais. J’ai l’impression qu’il nous a challengés sur certaines affaires. Ce qui est intéressant aussi, c’est que c’est une nouvelle équipe technique, donc ce qui était particulier, c’est que Julie et moi étions un peu les nouveaux dans l’aventure lors de la première journée de tournage. On était les seuls à avoir fait les deux saisons précédentes pratiquement, et c’était quand même nous autres qui étions les petits nouveaux gênés! Je pense que ces changements gardent quelque chose de neuf, quelque chose d’un peu fébrile pis c’est le fun.
JL : Je pense que le confort est pas un problème ou un danger, au contraire, je pense qu’un acteur qui est confortable et qui est confiant va avoir une plus grande liberté, va se risquer à essayer des affaires et va oser peut-être un peu plus. Le confort n’est pas un problème, et puis là on en n’avait pas pentoute en changeant d’équipe au complet. C’était tellement une autre façon de fonctionner, tellement une autre façon de tourner et c’était tellement écrit d’une nouvelle façon aussi que je me suis juste dis que c’était cool. Ce n’est pas juste nouveau, c’est un renouveau. J’avais l’impression d’amener cet univers-là encore plus loin, fait que c’était ben stimulant.
Que pensez-vous du changement de la formule au niveau du dévoilement des coupables?
PR : C’est le fun des méchants, c’est le fun de les voir , c’est le fun d’être avec les méchants et de comprendre leur motivation pis que ça ne soit pas dans les deux derniers épisodes qu’on nous balance tout ça.
JL : Je trouvais ça le fun parce que, dans les autres années, c’était très complexe, il y avait beaucoup de méchants. Là, c’est comme une trace. Même s’il y a des ramifications avec le passé de Victor, on est dans un chemin pis on avance, fait que je trouvais ça vraiment le fun. Comme spectatrice, j’aime ça savoir des affaires avant les enquêteurs. Il y a comme quelque chose de ben stimulant, on est un peu en avant des personnage. Je trouve que ça tient en haleine.
Est-ce que ça change la manière de jouer ?
PR : Pour nous, absolument pas parce que le personnage n’est pas au courant de qui l’a fait, mais je pense que pour le spectateur c’est intéressant parce qu’il voit la quête des deux. Tu vois la motivation du méchant, tu vois plus son parcours et tu vois aussi le parcours des enquêteurs. J’ai l’impression que c’est une nouvelle façon de raconter l’histoire.
Martin Michaud adapte ses propres romans . Est-ce que ça a été nécessaire de lire les livres pour bien construire les personnages ?
PR : C’est drôle parce que, en ce moment, je suis entrain de lire Ghetto X pour une compagnie qui fait des livres audio pour les personnages malvoyantes et les gens qui n’ont simplement pas le goût de lire. Pour les premières saisons, on nous avait demandé de ne pas les lire parce que, effectivement, c’est inspiré des romans mais il y a quand même beaucoup de liberté, il y a des personnages qui sont pas là. L’intrigue est semblable, mais il y a quand même des divergences donc on nous a dit de ne pas les lire tout de suite, fait que je me dis tout le temps que lorsque l’aventure va être terminée, je vais m’installer pis je vais clancher ça!
JL : Ce que Patrice Sauvé, l’ancien réalisateur, voulait faire avec Jacinthe était tellement loin de ce qu’elle était dans les romans qu’on a décidé tout le monde d’un commun accord qu’on n’allait pas lire les deux premiers romans pour plein de raisons.
Vu que Martin Michaud écrit en même les livres que la série, avez-vous senti une évolution psychologique différente de votre personnage ?
JL : Ce que j’avais à jouer était beaucoup plus touffu. On a maintenant accès à sa vulnérabilité vu que, au début, elle est séparée de son siamois Victor et ne fonctionne pas. Elle n’a pas de repère, elle a l’air plus dans le vide. Je trouvais ça super le fun d’être face à cette affaire-là qu’on commençait à établir dans la deuxième saison, le côté un petit peu plus sensible de Jacinthe.
Le plus beau d’un acteur c’est son naturel. Comment faites-vous pour inventer un naturel qui soi propre à votre personnage sans que le vôtre ne paraisse à l’écran?
PR : Je n‘ai pas du tout en moi son énergie et cette espèce de lourdeur qu’il trimballe. Enfin oui, je l’ai en moi car j’ai l’impression que nous l’avons tous en nous, mais je l’ai abordée avec une espèce de spleen intérieur. C’est ce corps-là qui dicte le naturel de Victor. J’ai souvent dit par rapport à Victor que je l’imaginais un peu comme un fêlé. Fait que ça doit être un naturel qui est teinté de ça.
JL: Dans la troisième saison, elle (Jacinthe) me revenait beaucoup plus facilement. À partir du moment où je remettais le constume, le corps arrivait avec, les jambes s’écartaient. Le costume aide beaucoup , la coiffure aide beaucoup. Le fait d’arriver le matin et de me faire un peu plus creusé, c’est comme si elle apparaissait devant moi. Elle est fun à jouer, donc je rentre dedans avec beaucoup de joie. Elle est très libératrice. Il y a des femmes qui me disent que je suis donc ben laitte dans Victor Lessard, mais je suis juste comme quand je me lève le matin! On est tellement habitué de nous voir sublimer que ça fait du bien que ça ne soit pas ça ici.
Vous avez eu la chance de jouer ensemble dans plein projets différents et travailler des rôles différents. Est-ce qu’en tant qu’acteur ça change la manière de critiquer et percevoir le jeu de l’autre dans d’autres projets que vous ne faites pas ensemble?
PR : Oh mais je critique jamais son jeu, je la trouve toujours bonne, Julie! Je la trouve juste. En plus, c’est mon amie, donc je ne la critique pas , je veux juste qu’elle soit bonne. Je ne suis pas très critique envers son travail, je suis vraiment un fan. Elle me surprend encore et c’est très bon signe !
JB : Ce que je trouve beau, c’est qu’il se débarasse de ses tics. On a tous des tics comme acteur, on a tous des espèces de trucs sur lesquels on retombe pis, en vieillissant, ce que je trouve beau c’est que Pat, il est tellement travaillant et consciencieux, il les évacue, il les enlève, fait que là je trouve qu’il est naturel et focus. Il est hyper incarné et magnifique.
Crédits Photos : Stéphanie Payez, Éklectik Média