Attendue à Granby depuis près deux ans, la participation de l’OSM au Festival international de la chanson de Granby dans le cadre du cinquantième anniversaire a été promue comme un événement extraordinaire qui restera à jamais gravé autant dans le paysage musical québécois que dans l’histoire du festival. Mettant en vedette sept interprètes ayant fait leurs premières armes au FICG (Isabelle Boulay, Émie Champagne, Luce Dufault, Fabienne Thibeault, Safia Nolin, Marie-Denise Pelletier, et Joanie Roussel), le concert, sobrement mis en scène par Monique Giroux, a effectivement donné lieu à des performances absolument ahurissantes et inoubliables. Ceci dit, l’ambiance générale de ce récital conduit par Dina Gilbert manquait parfois de magie et de proximité.
Défilant à tour de rôle sur la scène, toutes les artistes ont d’abord offert soit un classique du répertoire ou une pièce du leur en étant présenté par une photo de leur passage au FICG. Safia Nolin a ouvert le bal tout en douceur et mélancolie avec Igloo, chanson qui a remporté le Prix Socan au Festival en 2012. Quelques temps après, Joanie Roussel a survolté les spectateurs avec son incroyable puissance vocale et son spectaculaire contrôle sur l’immortelle Un peu plus haut, un peu plus loin. L’artiste a ensuite demandé à son amie Émie Champagne de la rejoindre sur Hymne à la beauté du monde, seul duo de la soirée.
Accompagnée par des arrangements somptueux et d’une chorale, Luce Dufault a splendidement dévoilé un frissonnant mariage de notes graves et hautes sur les planantes Des milliards de choses et Dis tout sans rien dire. Isabelle Boulay a affiché une belle retenue sur les pièces Le retour de Don Quichotte, Le saule et Aimons-nous, tout en sortant sa puissance aux moments opportuns. De son côté, Marie-Denise Pelletier a offert deux moments de grâce qui font encore trembler. Visiblement émue et reconnaissante de se rappeler le chemin parcouru depuis Granby, elle a déversé les émotions et l’intensité qui l’animaient sur le phénoménal succès Tous les cris les SOS qui est allé chercher une corde sensible chez les spectateurs. Toute la tessiture de l’interprète a été mis à exécution sur ce morceau, de l’a cappella jusqu’à des envolées mêlant merveilleusement notes aiguës et un rauque spectaculaire. Cette même intensité s’est poursuivie sur Le plus beau voyage de Claude Gauthier que Marie-Denise Pelletier, en ce début d’élections provinciales, a dédiée au grand René Lévesque.
Bien que louable et fort appréciée, la volonté d’enchaîner les titres rapidement a toutefois apporté une certaine froideur à l’ensemble. Puisque réunir sept interprètes de cette envergure sur la même scène tenait presque du miracle, il aurait été intéressant de profiter davantage de ce moment rare pour faire fleurir leur complicité par le biais de duos, de trios ou encore de chœurs, et également s’attarder davantage sur leurs passages au Festival en, par exemple, offrant quelques pièces qu’elles avaient jadis chantées.
Heureusement, une certaine proximité a pu être décelée entre les quatre interprètes ayant participé à Starmania. Il fallait, bien évidemment, souligner les 40 ans de cet opéra encore marquant et actuel dans le paysage musical d’aujourd’hui. Luce Dufault a revisité le personnage de Marie-Jeanne avec Les uns contre les autres, suivie de Marie-Denise Pelletier qui a retrouvé sa Stella Spotlight le temps de Les adieux d’un sex symbol. Isabelle Boulay les a rejointes pour une version fort convaincante de Monopolis. Est venue ensuite Fabienne Thibeault, accueillie et ovationnée comme une reine, pour offrir Le monde est stone. Luce, Isabelle et Marie-Denise ont toutefois entamé les premières notes de la célèbre chanson avec une telle force et chimie qu’il était particulièrement déchirant de les voir quitter la scène au bout d’une dizaine de secondes plutôt que de prolonger cet instant et lui faire atteindre son apogée en compagnie de Fabienne. Le spectacle s’est terminé ainsi. Sur papier, l’idée est belle, mais il a été extrêmement dommage de ne pas voir Safia Nolin, Joanie Roussel et Émie Champagne prendre part à la finale et ainsi déguster le mariage des univers grandioses de ce septuor qui aurait mérité un tour de chant collectif avant le salut théâtral.
Crédits Photos : Bertrand Duhamel