Pour Rosie, mais surtout pour Valérie Carpentier

Avec son excellent deuxième album Pour Rosie, Valérie Carpentier dénonce la superficialité du vedettariat et les standards de beauté irréalistes infligés aux femmes en s’inventant un alter ego plantureux du nom de Rosie. Le décolleté plongeant qu’elle a porté lors de la grande finale de La Voix 5 lui a donné raison de critiquer ce phénomène social. Victime de commentaires désobligeants, elle a remis les pendules à l’heure en publiant sur sa page Facebook une photo d’elle portant fièrement la perruque de Rosie et deux copies de son album pour couvrir sa nudité, sommant ainsi ingénieusement le public de la juger uniquement pour sa musique. Hier soir, dans le cadre d’un spectacle extérieur gratuit aux Francofolies, la chanteuse a non seulement prouvé son talent mais a revendiqué haut et fort la place qui lui revient dans le paysage artistique québécois.

©Benoit Rousseau/Francofolies 2017

Se la jouant énigmatique et Columbo en entrant sur scène affublée d’un trench coat beige et d’un chapeau noir, Valérie Carpentier a entamé la soirée avec la pièce jazz rétro Polaroid, envoûtant d’emblée le public enthousiaste. Interprétant exclusivement les titres de Pour Rosie afin de conférer au spectacle un univers singulier et cohérent, la gagnante de la première édition de La Voix n’a pas pris de temps pour introduire Rosie. Vêtue d’un manteau de fourrure blanc et d’une longue robe mauve sexy, Rosie a déclamé son manque d’affection en précisant que Valérie ne se retrouve pas sur la scène. Voilà donc la rectification établie pour les spectateurs pensant que Valérie partage et endosse les valeurs de son personnage.

©Benoit Rousseau/Francofolies 2017

Rosie a raconté son mode de vie et sa solitude extrême grâce aux chansons Pour Rosie, Les Fleurs Sauvages, Magazine, L’oiseau ainsi que Young And Lonely (sur laquelle le public a activement participé aux refrains). Impressionnée par la foule imposante, Valérie a parfois décroché de son personnage, mais ses réactions étaient trop adorables pour qu’on lui en tienne rigueur. Sur le plan vocal, elle a affiché une belle puissance et maîtrise même si la nervosité lui a fait oublier quelques paroles et cues musicaux, notamment sur la sulfureuse Go On, qui pourrait figurer sur une trame sonore d’un James Blond. Le (trop) haut volume des instruments n’a pas aidé également.

©Benoit Rousseau/Francofolies 2017

Pour présenter en duo la pièce Chéri?, qui traite d’un divorce, Valérie a fait appel à Karim Ouellet. Accueilli généreusement, le chanteur, qui se produira d’ailleurs aux Francofolies les 16 et 18 juin, a offert une performance chaleureuse. Les voix des deux artistes se complétaient à merveille.

©Benoit Rousseau/Francofolies 2017

Quelques minutes après cette prestation, Valérie a lentement enlevé la perruque blonde et rose champagne de Rosie pour signifier sa mort. Les musiciens ont aussitôt quitter la scène sans avertir la vedette, symbolisant intelligemment les amitiés éphémères reliées à la célébrité.  »La vraie » Valérie, avec sa discrète queue de cheval, a salué comme il se doit ses admirateurs avant de s’installer derrière le clavier pour interpréter L.A, Paris, Berlin. C’est ainsi qu’est né le moment le plus touchant du spectacle.

©Benoit Rousseau/Francofolies 2017

La douce voix de la jeune femme a continué de transporter grâce aux textes de Ciel et Adieu, dédiée à tous les connards. Traitant de liberté, d’amour et de voyages formateurs pour la jeunesse, Valérie Carpentier a terminé son magnifique concert en démontrant que sa génération vaut bien plus que les préjugés qu’elle doit constamment essuyer.