Jusqu’au 30 mai, l’Espace Libre est occupé par Violette, une jeune femme fort attachante qui accueille un spectateur à la fois dans sa minuscule chambre aux murs blancs. La douillette fleurie du lit, la couverture de laine blanche sur les genoux et la petite toile mettant en scène des corneilles survolant une forêt de conifères montrent que Violette déborde de vie, mais qu’elle est vautrée dans la solitude. Assis sur son lit, après avoir fait vaguement connaissance avec Violette, le spectateur est invité à connaître ce qui explique cette triste solitude à travers un conte de 15 minutes à la fois lumineux et troublant résidant au sein d’une lunette et d’un casque de réalité virtuelle.
Tous les sens du spectateur sont alors sollicités de manière rapide et intense. Le temps d’adaptation face à l’univers en trois dimensions varie selon les spectateurs. L’envie de toucher aux images et de sursauter quand elles s’approchent par surprise de trop près demeure présente tout au long de la représentation, mais elle ne prend jamais le dessus sur la pertinence du texte d’Amélie Dumoulin. Pour bien illustrer son sujet, cette dernière a interrogé de jeunes femmes atteintes d’une déficience intellectuelle qui ont subi des situations d’abus et des agressions sexuelles. 70% et 90% d’entre elles subiront malheureusement ces abominations.
Expérimentant lui-même le désespoir et la solitude qui émane du récit, le spectateur plonge dans l’intimité de Violette à la fois inconfortable et intrigué. Inconfortable d’être impuissant. Touché de cette fable à un point tel qu’il veut serrer Violette fort dans ses bras et l’emmener loin de cet homme qui trouble ses sentiments, viole son innocence. Son espoir et sa lumière malgré sa détresse bouleverse, puisque les actrices sont d’une justesse irréprochable. Impossible d’oublier les roses bleues de Violette et son regard rêveur et mélancolique vers la forêt et le ciel qu’on lui souhaite rayonnants.
À la sortie du théâtre, la réalité frappe de plein fouet. L’égoïsme nous envahit. On a été conscientisé, touché, mais la vie continue et on ne fera rien pour le reste de la soirée et lors des prochains mois pour dénoncer cette réalité inconcevable. Le ciel gris émet quelques gouttes de pluie. Les larmes de Violette. Pour qu’on n’oublie pas malgré le rythme effréné de la vie…
Dixième création de la compagnie Joe Jack et John, qui est maintenant en résidence à l’Espace Libre, Violette est interprétée par 3 comédiennes différentes (Stephanie Boghen, Stéphanie Colle et Anne Tremblay). Il reste encore des billets pour les représentations en français et en anglais. Vous pouvez réserver votre place en cliquant ICI.
Crédits Photos : Michel St-Jean