Aussi étonnant que cela puisse paraître, Alexandre Poulin a vécu, hier soir au Parc de la francophonie, son premier Festival d’été de Québec en tant qu’artiste invité. Soulignant que la vie est parsemée de premières fois qui possèdent toutes des degrés d’importance variables, l’auteur-compositeur-interprète a affirmé que, pour lui, celle-ci serait inoubliable. Elle l’a également été pour les nombreux festivaliers présents qui ne se sont pas fait prier pour se laisser enivrer par les douces histoires bouleversantes de ce poète du quotidien.
Les spectateurs qui ont déjà vu l’artiste en spectacle dans une salle intime ont été à même de constater qu’il ne s’est nullement senti intimidé par l’impressionnante renommée entourant le FEQ et qu’il est demeuré l’authentique chansonnier à saveur pop-folk qu’on connait et apprécie. Inséparables guitare et harmonica au garde-à-vous, Alexandre Poulin a dévoilé en toute simplicité ses mélodies tantôt tendres, tantôt entraînantes mais toujours accompagnées de textes sincères poussant à l’introspection. Affichant constamment un irrésistible sourire de gamin et un regard bouillonnant de passion, le chanteur de 40 printemps a semblé ému de voir autant de gens chanter ses compositions sans la moindre hésitation lorsqu’il se taisait volontairement.
Devant une foule à la fois dynamique et attentive, Poulin a présenté une sélection de titres satisfaisante qui regroupait la plupart de ses succès radiophoniques et les pièces de prédilection des admirateurs purs et durs. Il a évidemment accordé une place de choix à son plus récent opus, Les temps sauvages, qui explore en profondeur et avec une troublante lucidité des thèmes chers à l’ancien enseignant du secondaire : profiter des petits plaisirs de la vie, échapper à l’étouffant métro, boulot, dodo et la tristesse de l’amour automatique. Les pièces moins connues comme la jolie Lundi et Le temps qu’on tremble ont autant ravi le public que les extraits Couleurs primaires et Nos cœurs qui battent, qui jouissait d’ailleurs d’un rafraîchissant traitement rock en fin de parcours.
Le troisième album, l’excellent Le mouvement des marées, n’a également pas été en reste avec la livraison des populaires Souffler sur les braises, Blanc cassé , qui raconte de manière originale comment une déception amoureuse peut mener à la rencontre de l’âme sœur, et l’incontournable hymne aux voyages et à la liberté Comme des enfants en cavale. Généreux et chaleureux, Alexandre Poulin a dérogé à la règle stipulant que les artistes vedettes de la soirée ne participent pas à la première partie en invitant le groupe 2Frères à l’accompagner sur la sublime Fernand. N’en étant pas à leur première collaboration, les artistes ont offert un moment savoureux riche en harmonies et en grattements de guitare inspirés.
Avant de conclure en beauté avec la positive Une lumière allumée qui a , bien sûr, été accueillie par une douce tempête de cellulaires allumés, le chanteur a présenté un autre instant de grâce en entonnant L’écrivain, une pièce qui, à ses dires, ne lui appartient plus. On pouvait littéralement entendre une mouche voler pendant ce touchant hommage aux enseignants qui redoublent d’effort et d’imagination pour stimuler la créativité de leurs élèves et éveiller leur estime de soi. Plonger dans un silence quasi complet une foule composée de milliers de festivaliers, c’est effectivement un acte unique qu’on n’oubliera pas de sitôt.