Première mondiale de la nouvelle version du spectacle emblématique du Cirque du Soleil « Alegria un nouveau jour ».
Le mot cirque évoque bien des images dans la pensée du public. On pense aux chapiteaux, à des prouesses physiques, à des costumes somptueux, à de la magie, des frissons et des clowns. Lorsque l’on pense à une compagnie de cirque, c’est bien le Cirque du Soleil qui nous apparaît à l’esprit. Une compagnie extraordinaire qui s’est imposée dans l’univers circassien et celui du spectacle depuis près de 40 ans dans le monde entier, avec des spectacles toujours plus époustouflants. Et si l’on doit nommer un seul des spectacles du Cirque du Soleil, c’est Alegria qui nous vient en tête. Un spectacle emblématique qui vit le jour en 1994 au Québec. La première version fût présentée aux quatre coins du monde et vit sa tournée s’achever en 2013 (19 années de voyages et de représentations). La chanson-thème du spectacle fût sélectionnée pour un prix Grammy en 1995, et est la chanson la plus écoutée du Cirque du Soleil sur Youtube.
Autant dire que reprendre ce spectacle était à la fois un défi excitant, très attendu et sans possibilité d’une seule fausse note.
Pour cette version 2019 « Alegria un nouveau jour », c’est Daniel Ross et Jean-Guy Legault qui remplacent respectivement Gilles Ste-Croix et Franco Dragone à la direction de création et à la mise en scène.
Jeudi 25 avril 2019, au Vieux-Port de Montréal. Après une première semaine de représentations d’essais du spectacle, c’est ce soir que cette fraîche version est présentée en première mondiale. Un événement très attendu dans le cœur des fans. Dès l’instant où l’on pose le pied sur le quai du Vieux-Port de Montréal, on est happé par la magie du Cirque du Soleil. Pour le moment rien d’étonnant à cela, ceci est leur signature. Pour chaque spectacle, ils se font un plaisir de transporter le public dans un univers extraordinaire, peuplé d’étranges créatures, empreint de magie et de beauté. Presse et invités foulent le tapis rouge aux côtés de quelques artistes du spectacle, jouant à prendre la pause sous l’œil amusé des photographes. Ce soir c’est fête ! Avant l’ouverture des portes du chapiteau, le public est abreuvé de champagne, cocktails, petit-four et autres sucreries. Des amuseurs offrent des cadeaux, prennent des photos et distraient le public, sous la musique d’un dj présent spécialement pour l’occasion. Des ateliers de leur partenaire MAC (firme de maquillage professionnel) offrent même des maquillages aux thèmes du spectacle aux petits et grands. L’ambiance est à la joie ; on ressent une excitation et du bonheur dans l’air.
Le public est invité à s’installer et découvre la scène du nouveau spectacle. Plus petite que ce que l’on aurait pût imaginer, la scène (en formation à l’italienne sous chapiteau) est créée sur 3 niveaux. Cela représente les 3 « mondes » du spectacle (la Cour Royale, la rue et le portail entre les deux). En fond de scène est placée une magnifique structure amovible, mêlant orfèvrerie et épine (rappel de la nature) ainsi qu’un sublime trône qui se retrouvera très vite en pièces détachées.
Les clowns arrivent et distraient le public, là aussi signature du Cirque du Soleil. Et enfin, l’entrée de M. Fleur. Ce personnage central est l’ancien fou du roi qui, après la mystérieuse disparition de ce dernier, prend la place sur le trône, devenant un monarque despotique et imbu de sa personne. Sous l’œil des aristocrates, il s’empare du sceptre et, par la même occasion, du pouvoir. « Alegria » !!!!
Le premier tableau commence très fort avec un numéro d’acro pôles exécuté par les aristocrates. « Combinant barre russe et banquine, les artistes bondissent et se tiennent en équilibre sur des barres normalement destinées au saut à la perche tenues à l’horizontale, ce qui permet aux voltigeurs d’exécuter un surprenant ballet aérien au-dessus des porteurs. » La technique est déjà époustouflante en elle-même ; mais notons à cela que les aristocrates arborent des costumes avec prothèses faciales et corporelles (exagération des nez, des fesses et des poitrines). La difficulté en est considérablement augmentée.
Le design des aristocrates rappelle ceux de l’époque qui portaient des masques. Leurs costumes sont élimés, emprunts du faste d’antan ; ils ont subis le poids des années et du changement. Représentation parfaite d’un peuple qui s’accroche à son faste passé et refusant tout changement de peur de perdre leur statut et leurs acquis. Aussi, ils ont les premiers à se ranger du côté de M. Fleur quand celui-ci prend le pouvoir.
(une belle galerie photos se retrouve en bas de l’article)
Mais un autre peuple n’est pas du tout d’accord avec la montée arbitraire et despotique de M. Fleur sur le trône. Il s’agit des Bronx. Représentation des gens de la rue, ils sont forts, énergiques et combattants. Leurs costumes évoquent ceux des danseurs de capoeira. Notons que les filets que portent les Bronx sont fabriqués avec le même matériel utilisé pour la fabrication de filets de hockey. L’arrivée des Bronx est tonitruante. Ils sautent et envahissent l’espace. Il est clair que M. Fleur les craint. Le deuxième numéro est un numéro de roue Cyr double. Ingénieux ; cette roue croisée permet à l’artiste de tourbillonner sur tous les plans. Force, grâce, splendeur et technique sont les mots d’ordre de ce numéro.
De la splendeur il y en a tout au long du spectacle.
Le duo de trapèze croisé enchante le public avec ces deux anges qui s’élancent à plusieurs dizaines de mètres au-dessus de leur tête. Après l’entracte, le numéro de reprise, le duo de sangles aériennes méduse les spectateurs. Un Bronx et un Ange tombent amoureux et s’envolent dans les airs dans un duo de porté aérien (sans filet, ni accroche) mêlant passion et vigueur. Un des plus beaux numéros du spectacle.
Les oiseaux sont présents depuis le début, accompagnant M. Fleur, dansant et ondulant en de gracieux mouvements, et agitant leurs ailes. Le visuel est très proche de celui des oiseaux d’origines et les adeptes d’Alegria de la première heure en sont ravis. Ce charmant duo effectue un numéro de main à main sous la chanson Vai Vedrai. À cet instant, porté par la magie de ce duo de jeunes femmes (très jeunes même, la plus petite ayant une dizaine d’années), la chanson prend tout son sens. Cette fois-ci interprétée par la chanteuse noire, elle raconte l’amour d’une mère pour son enfant et lui souhaite de trouver son chemin et l’incite à vivre sa vie. Un moment d’émotion qui fît couler quelques larmes. On peut également prédire une très belle carrière à la plus jeune circassienne de ce duo. Ses splits, son contrôle des équilibres et la maîtrise parfaite de son corps en font d’ores et déjà, une grande artiste.
Un numéro attire également une attention toute particulière, c’est celui de la danse du feu. Une nouvelle donnée intégrée au spectacle qui n’existait pas lors de la première version. Un petit clin d’œil à Guy Laliberté, président fondateur du Cirque du Soleil, qui fût artiste de cirque de rue et cracheur de feu pendant de nombreuses années. Un numéro qui met littéralement le feu, sublimé par la batteuse, apparaissant en fond de scène chevauchant une énorme batterie.
Les clins d’œil sont nombreux. Il est agréable, pour les initiés, de les chercher et les reconnaître. Par exemple, le duo de clowns, drôle, touchant et adorable ; rend hommage au Slava’s Snowshow, avec leur numéro de la perte de son ami et de la tempête de neige. Slava qui était le clown de la première version du spectacle Alegria, y présentait son numéro enneigé ; dont il continue à faire tomber la neige sur le public encore aujourd’hui à travers le monde.
Le visuel est époustouflant et les milliers d’heures de travail (tant pour la scénographie, que pour les costumes, pour les maquillages plus humains cette fois-ci, les heures de répétitions, entrainement et de créations) sont ressentis et laissent le public émerveillé !
Quant est-il de la musique ? N’oublions pas que la bande-originale d’Alegria en est également sa signature. En 1994, la chanteuse blanche interprétée par Francesca Gagnon connut un succès phénoménal ! Cette artiste à la voix rauque et blues, tout en étant menue et fragile, à marqué les esprits. Autant dire que la chanteuse blanche avait un grand poids sur les épaules et était très attendue. C‘est Jean-Phi Goncalves qui signe les arrangements du nouveau livret musical. Comme il le dit « Il déconstruit les chansons, pour en garder la structure et reconstruit sur le squelette ». Et bien monsieur, pari réussi ! Non seulement les chansons sont contemporaines, agréables à l’oreille, préservant l’identité des chansons originelles ; mais elles sont même utilisées de manière très intelligente et prennent tout leur sens dans la mise en scène du spectacle. « Alegria un jour nouveau » conserve la chanteuse blanche et noire, à la différence qu’elles sont désormais égales et complémentaires. Elles se partagent les interprétations et jouent ensemble. La chanteuse noire dans un registre plus rock et énergique, à l’image des Bronx qui se révoltent ; et la chanteuse blanche plus naïve, douce et sage, symbole de guide et de lumière. Les fans adorent !
Merveilleux également de noté que toutes les musiciennes sont un ensemble uniquement de femme.
Pour conclure, c’est bien plus qu’une reprise du spectacle ; « Alegria un nouveau jour » en est la continuité parfaite. Moderne, contemporain ; le spectacle est au fait de l’actualité de 2019 (il suffit de regarder le soulèvement du peuple français contre la politique du pays, pour y voir un parfait exemple). La patte du Cirque du Soleil est partout et ils prouvent encore et toujours qu’ils sont innovateurs, intelligents et passionnés dans leurs créations.
En représentation à Montréal jusqu’à la fin du mois de juillet 2019 ; puis en tournée dans le monde entier, on souhaite une magnifique vie à « Alegria un nouveau jour ». « Alegria !!! »
Crédits photos : © Angéline Gosselin / Éklectik Média
Fiche technique
Reprise création originale du Cirque du Soleil
Du 18 avril au 21 juillet 2019
À 16h & 20h
Guide, président-fondateur du Cirque du Soleil : Guy Laliberté
Chef de la direction, production exécutive : Yasmine Khalil
Vice-président, création : Daniel Fortin
Productrice : Gabriel Pinkstone
Directeur de la création (1994) : Gilles Ste-Croix
Metteur en scène (1994) : Franco Dragone
Directeur de la création (2019) : Daniel Ross
Metteur en scène (2019) : Jean-Guy Legault
Conceptrice des costumes : Dominique Lemieux
Scénographe et conceptrice des accessoires : Anne-Séguin Poirier
Compositeur : René Dupéré
Directeur musical & arrangements : Jean-Phi Goncalves
Chorégraphe acrobatique & conceptrice des performances acrobatiques : Emilie Therrien
Concepteur des éclairages : Mikki Kunttu
Concepteurs sonores : Jacques Boucher, Jean-Michel Caron
Directeur principal – conception & gestion de performance humaine : Richard Lepage
Concepteur de l’équipement acrobatique : Pierre Masse
Conceptrice des maquillages : Nathalie Gagné
Directrice de production : Lucie Janvier
Directeur technique : Christian Laflamme
Distribution : Les artistes circassiens du Cirque du Soleil (non communiqués)
Durée : 2h avec entracte de 25min
Chapiteau du Cirque du Soleil
Vieux Port de Montréal
Quai Jacques Cartier, rue de la Commune Est
Montréal, Québec, Canada
H2Y 1J1
Tarifs : de 74.75 $ à 512,50 $