Hier soir débutait en grand la neuvième édition du Festival Éole en musique qui se tiendra au Parc des îles de Matane jusqu’au 11 août. Les festivaliers n’ont pas laissé les énervants soubresauts de pluie fine les empêcher de savourer une soirée à influence country en compagnie de Marco et Gino, Guylaine Tanguay et Isabelle Boulay!
Sur le coup de 18h30, le duo Marco et Gino a réchauffé le public avec une sélection de chansons principalement anglophones connues chez tous les amateurs de musique country. De Irvin Blais à Willie Nelson en passant par Shania Twain avec une version dynamique de I’m Outta Here, les chanteurs et musiciens gaspésiens ont livré un spectacle chaleureux et d’une franche simplicité. Pour leur premier concert dans un festival aussi prestigieux, les deux amis se sont montrés drôles et généreux. Ils ont gratifié la foule timide de belles harmonies et de puissants solos de guitare qui ont lentement mais sûrement suscité un regain d’enthousiasme, surtout lors de la chanson Home de Phillip Phillips. Par contre, l’intérêt s’est un peu dissipé sur Hey Brother d’Avicii. Il s’agissait d’un choix intéressant car ce morceau dance possède des arrangements country, mais des problèmes techniques et de justesse ont nui à la performance. Heureusement, tout a été pardonné lors d’Amazed de Lonestar qui a conclu le spectacle de manière touchante.
Aux alentours de 19h30, Guylaine Tanguay a proposé un mariage énergique et judicieux de chansons se retrouvant sur ses albums Mon livre vert, Classique Country, Inspiration Country, Passion Country et 3764 Elvis Presley Boulevard paru en juin dernier. Originaire de Girardville près de Dolbeau-Mistassini, la chanteuse de 45 ans a séduit la foule de plus en plus nombreuse et enthousiaste avec une ribambelle de succès ayant fait danser plusieurs générations. Ce tout nouveau spectacle a commencé avec Suspicious Minds et Jailhouse Rock. Par la suite, les clins d’œil fort appréciés rendus au King (Burning Love, Blue Suede Shoes, Can’t help falling in love, pour ne nommer que ceux-là) ont été espacés pour laisser la place à d’autres bombes musicales dont I will always love you, Thank God I’m a country girl, Colinda et même Provocante de Marjo!
En forme vocalement, Guylaine Tanguay s’amusait ferme avec ses musiciens et ne s’est pas gênée pour exécuter quelques déhanchements avec eux. Le public a pris part à cette fête sans peine. Il s’est même improvisé choriste sur Jusqu’au bout du monde. Tanguay a ensuite revisité à sa sauce quelques morceaux populaires dans le paysage pop/rock québécois tel que Embarque ma belle de Kaïn, Fais attention des BB et J’entends frapper de Michel Pagliaro. À travers cette offrande de reprises, Guylaine a présenté la chanson originale Danse avec moi qui a été bien accueillie, mais pas autant que la suivante: Il m’a appris à Yodler. Sur cette dernière, le public a tenté sans peur de se prêter à l’exercice, mais ce n’était rien comparé à l’impressionnant souffle de la chanteuse qui a ébahi par sa vitesse et ses petits sautillements du haut de ses bottes noires agrémentées de plumes.
Même si l’interprète encourageait souvent la foule à taper des mains, à se trémousser et à chanter à tue-tête, elle lui réservait des moments touchants comme Vole colombe. Celle-ci a brillamment permis à l’artiste de combiner rauque et magnifiques envolées aiguës. Elle a profité de la tribune qui lui était attribuée pour remercier sincèrement le public de l’avoir soutenue et s’être intéressé à son talent massivement avant les médias qui, eux, n’ont fait que suivre la tendance. Cet amour du public était palpable, même de la part de plusieurs jeunes filles qui connaissaient sans la moindre hésitation des classiques tels que Un verre sur la table, De la neige sur la bible de mon père, Partons la mer est belle et Lâche pas la patate. Comme quoi ce genre est accessible à tous!
La frénésie était à son comble lorsque Isabelle Boulay, vers 21h30, est allée à la rencontre de son public de la première heure avec une touchante lueur de fierté et de bonheur dans les yeux. L’interprète, qui, le 8 août, a inauguré un parc à son nom sur la plage municipale de Sainte-Félicité, sa ville natale, a pigé dans son éventail de grands succès tout en n’oubliant pas de faire honneur à la country, la musique la plus proche du cœur selon elle. Reconnaissante et émue par l’amour inconditionnel des spectateurs, l’artiste a pris le temps d’accueillir cet élan d’affection tout particulier. Désireuse d’offrir à sa ville d’appartenance ce qu’elle est venue entendre, la chanteuse a entamé ce concert inédit avec les hits La lune, J’enrage et Jamais assez loin sur laquelle le public a, évidemment, admirablement bien fait son devoir.
Pour célébrer comme il se doit ses noces d’émeraude avec les gens qui l’ont vue grandir et s’épanouir internationalement, elle leur à maintes reprises tendu le micro pour qu’ils crient sans censure les célèbres paroles, geste qui a démontré toute la générosité et la simplicité de l’interprète. Cette sincère communion a donc été l’hôte de moments magiques empreints de nostalgie, comme pendant l’interprétation de Je t’oublierai, je t’oublierai, ce cadeau inoubliable que Luc Plamondon et Richard Cocciante lui ont offert après l’aventure Starmania. Avec son rauque unique, elle a enchaîné avec Parle-Moi avec cette intensité si caractéristique. Faisant voyager sa voix là où elle le veut, la Gaspésienne a constamment submergé et bercé la foule de vagues d’émotions tantôt déchirantes tantôt lumineuses.
Complice avec ses musiciens à qui elle a donné la chance de briller grâce à plusieurs puissants solos (dont celui, extraordinaire, du directeur musical Simon Godin sur la chanson ouvrière Les mains d’or), elle a également présenté quelques titres issus de En Vérité, son plus récent opus sorti en mai 2017. Sur Mon amour (La Supplique), elle a opté pour une atmosphère alliant merveilleusement sensualité et désarroi. La grande chanson d’amour italienne Una storia d’amore a donné des frissons, en partie grâce à une note finale des plus majestueuses. Par la suite, avec une émotion palpable dans la voix, elle a dédié Nashville, chanson composée par Cœur de pirate , à son enfance et à toutes celles des Gaspésiens.
Le public a démontré qu’il appréciait cette tangente country en chantant haut et fort Perce les nuages de Paul Daraîche, artiste avec qui Isabelle Boulay a partagé son premier passage au Festival Éole en musique en 2013, et l’intemporelle Mille après mille. Composant avec les bourrasques de vent avec un humour et une candeur irrésistibles, la chanteuse de 46 ans a électrisé les spectateurs avec une reprise ahurissante de Still loving you de Scorpions avant d’offrir un karaoké à ciel ouvert avec les incontournables Entre Matane et Bâton Rouge et Le saule en guise de conclusion.
Enfin, ce retour au bercail a prouvé que, peu importe la gloire et les années qui passent, Isabelle Boulay demeurera toujours la charmante jeune fille rêveuse qui chantait sur les tables du restaurant familial et qui se laissait inspirer par les flots sublimes de la mer.
Crédits Photos : Stéphanie Payez/Éklectik Média