Une semaine et un jour après le lancement de son piano-film Incarnat au Théâtre Outremont, l’auteure-compositrice-interprète Ariane Moffatt y est retournée le 28 octobre pour, cette fois, tenir la première montréalaise de son spectacle Incarnat où elle ne peut reposer que sur elle-même étant la seule artiste présente sur scène…
Ce défi de proposer une tournée en solo, la professeure de création musicale de Star Académie l’avait en tête depuis un moment pour célébrer au piano les 20 ans de son premier album, Aquanaute, et, par le même coup, faire une rétrospective acoustique de ses plus grands succès jusqu’à maintenant. Puis, une certaine pandémie est arrivée, a avorté les plans et a engendré un nouveau processus créatif spontané et plus personnel que jamais guidé par la fragilité de la vie et la vulnérabilité. Ce qui a donné lieu au sublime septième album du nom d’Incarnat.
Incarnat comme la couleur oscillant entre le rose et le rouge-orangé franc qui se dégage des couchers de soleil. Pour représenter de manière à la fois épurée et spectaculaire cette ambiance mystique d’une beauté inouïe, un amoncellement de pampas incarnates ressemblant à un champ de blé soufflaient docilement et tranquillement au son des mélodies. Ce décor de plumes apaisant était absolument parfait pour les pièces vaporeuses et empreintes de déchirants constats amoureux comme Distance, Phèdre en forêt, Décalage et Incarnat. Pour des pièces plus rythmées, l’éclairage au laser formant des projections et des halos se rendant jusqu’aux spectateurs était une trouvaille exceptionnelle. L’expérience musicale déjà riche devenait alors sensorielle et donnait l’impression de sortir momentanément de la réalité de manière saine, une sensation plus que précieuse par les temps qui courent.
Lors de cette première montréalaise, une fébrilité, un vertige relié à l’abandon le plus total étaient palpables, et ce malgré toute l’expérience variée qu’Ariane Moffatt a vécue sur scène en explorant son univers et celui des autres. Cette nervosité qui transperçait sa douce voix , qui faisait légèrement trembloter ses doigts sur le piano et qui occasionnait des interventions franches et drôles n’entravait absolument rien au rendu professionnel de l’artiste, mais ajoutait une nuance d’authenticité et une once d’intimité qui bonifiaient la connexion entre Ariane et son public, son plus imposant depuis les deux dernières années.
Cette émotion créée par le fait que les spectateurs ne sont plus à un siège de distance et qu’ils peuvent un peu plus chanter et se déhancher sur leur siège a propulsé à un niveau encore plus galvanisant que d’habitude l’évasion musicale proposée par la chanteuse qui, en embrassant pleinement son stress, a fait preuve d’une vulnérabilité poignante et charmante. Les admirateurs de la première heure ont même pu savourer l’évolution du registre vocal d’Ariane Moffatt depuis les dernières années. L’artiste s’abandonne tellement qu’elle donne naissance sans effort à des notes tantôt rauques, tantôt célestes, voire lyriques sur La fille de l’iceberg rarement entendues dans ses projets précédents.
Sa tessiture vocale unique a donné de nombreux frissons, frissons qui ont atteints leur apogée lorsqu’Ariane Moffatt a décidé de déroger à la définition de solo en invitant sa grande amie Marie-Pierre Arthur à se joindre à la pièce Jamais trop tard , une reprise bilingue de la pièce Everybody’s got to learn sometime par Beck qu’Ariane a découvert grâce au film Eternal Sunshine of the spotless mind de Michel Gondry. La symbiose de leurs voix était magique. Leur complicité et leur joie de pouvoir chanter en duo comme avant se répercutaient chez le public qui ne pouvait faire autrement que d’être à son tour étrangement émotif.
Évidemment, Ariane Moffatt n’est pas Ariane Moffatt sans une portion énergique au cours de laquelle elle se déchaîne passionnément sur ses synthétiseurs. Pour cette tournée, on peut même dire qu’elle s’est surpassée avec un medley électrisant de Mon Corps, Hôtel Amour et Walls of the world qui rendait insupportable l’obligation de ne pas se lever pour danser.
Pour les rappels, la chanteuse, grâce à l’apport du metteur en scène Philipe Cyr, a effectué des changements à deux de ses succès radiophoniques. Elle a agrémenté Réverbère et Pour toi avec une bonne dose de rock et de guitare électrique. Le résultat était époustouflant, moderne et même sexy! Espérons maintenant que ces versions iront vers le chemins des studios d’enregistrement…
La tournée Incarnat se poursuit partout à travers la province. D’ici là, Ariane Moffatt est en nomination au Gala de l’ADISQ dans plusieurs catégories dont Interprète féminine de l’année. La soirée, animée une seizième fois consécutive par l’humoriste Louis-José Houde, se tiendra le dimanche 7 novembre sur les ondes d’ ICI RADIO-CANADA TÉLÉ. Alors que la chanteuse a déjà offert une prestation lors du Premier Gala de l’ADISQ diffusé le 3 novembre dernier, peut-être qu’elle réserve une autre surprise pour ce dimanche et qu’elle accompagnera de nouveau Louis-José Houde dans les désormais célèbres segments de piano bar…
Crédits Photos : Stéphanie Payez, Éklectik Média
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