« Dans une chambre d’hôtel, douze heures avant la fusillade de Dallas, Jack (John F. Kennedy) et Jackie s’abandonnent à une fascinante hallucination qui explore la fragilité humaine à l’approche du sort tragique qui les guette. » C’est la description qu’on retrouve sur le site de l’Opéra de Montréal. Le titre de cet opéra aurait dû être « Jackie » tellement ce personnage est plus présent à notre esprit que celui de JFK lorsque nous quittons la salle. Évidemment, cet opéra nous invite à explorer un univers musical fort différent de ceux de Puccini, de Verdi ou même de Britten. Certains passages sont magnifiques, d’autres très peu attrayants.
JFK ne fait pas non plus dans la dentelle. Nous y retrouvons un John Kennedy toxicomane et une Jackie dépressive, tous deux hantés par les fantômes nocturnes qui les visitent. Nous sommes loin du couple glamour que les médias nous présentaient en 1963. Nous avons plutôt l’impression d’assister à deux heures de lamentations, d’hallucinations à travers quelques passages loufoques qui parviennent à peine à faire sourire.
©Yves Renaud/Opéra de Montréal
J’ai cependant découvert les voix riches de Matthew Worth et de Daniela Mack dans les rôles de Jack et Jackie. Daniela Mack nous saisit d’entrée de jeu par son long (trop long) monologue au début du spectacle, debout derrière une fenêtre. Le reste de la distribution est solide tant sur le plan vocal et sur le jeu d’acteur.
Le souvenir de la première rencontre de Jack et Jackie au premier acte est un moment touchant et visuellement très beau. Il faudra attendre le trio de Clara, et des deux Jackie au deuxième acte pour se laisser à nouveau atteindre par l’émotion. Ce dialogue entre le présent et le futur où Jackie Onassis rassure Jackie Kennedy sur l’amour de John demeure à mon avis le plus beau passage de cet opéra.
©Yves Renaud/Opéra de Montréal
Les décors, les costumes et les projections sont dans l’ensemble fort bien réussis. La mise en scène de Thaddeus Strassberger est bien pensée et efficace. J’ai particulièrement apprécié le tableau d’ouverture et celui de la Chambre de commerce de Fort Worth. Beau travail de la part de l’Orchestre symphonique de Montréal sous la direction Steven Osgood. Belle prestation du chœur de l’Opéra de Montréal qui a su insuffler quelques moments de grâce dans ces deux heures de spectacle.
Je suis sorti de la première de JFK perplexe, dérouté par ce que j’ai vu et entendu. Je ne suis probablement pas le seul. Plusieurs personnes assises autour de moi ont quitté la salle après l’interminable premier acte. Et cette dame à ma droite de dire à la fin – « Ben coudonc, yé mort! », en dit long sur l’impression que nous laisse cet opéra.
Opéra de David T. Little et Royce Vavrek (2016)
Distribution: Matthew Worth, Daniela Mack, Daniel Okulich, Talise Trevigne, Sean Panikkar, Cree Carrico, Katharine Goeldner, Casey Finnigan
Orchestre symphonique de Montréal: Steven Osgood
Chef de chœur: Claude Webster
Mise en scène et décors: Thaddeus Strassberger
Costumes: Mattie Ulrich
Lumières: Chad R. Jung
Co-production de l’Opéra de Montréal, du Fort Worth Opera et de l’American Lyric Theater
Salle Wilfrid-Pelletier de la Place des Arts.
Reprises : 30 janvier, le 1er et 3 février à 19 h 30.
Crédit de la photo de couverture : ©Yves Renaud