Orgueils et préjugés apporte une énergie débridée sur les planches du Théâtre Denise Pelletier. Œuvre phare de la littérature anglaise, ce roman reste une référence romantique, grâce à de multiples relectures.
Les chroniques de Bridgerton en est d’ailleurs le plus récent exemple, la populaire série s’inspirant librement de Jane Austen. Frédéric Bélanger nous offre à son tour une version d’un style télévisuel dans un déploiement de costumes, de danses et autres jeux de lumière ! Un heureux mélange de classicisme, parsemé d’anachronismes, dont une musique digne d’une discothèque.
Sur scène, on entre dans l’intimité des Bennet où l’arrivée d’un richissime voisin cause tout un émoi. Si les filles de la famille rêvent d’un mariage arrangé, leur mère y voit l’occasion d’assurer la fortune de sa descendance. Élizabeth est le mouton noir de son clan. Esprit libre et rebelle, elle refuse les normes établies. Mais dans une société où la femme reste un faire-valoir, elle peine à s’émanciper. Et sa rencontre avec l’arrogant M. Darcy est loin de lui plaire…
L’adaptation de Rébecca Déraspe conjugue l’esprit du modèle originel tout en soulignant son étonnante modernité. Le texte est en cela un petit bijou théâtral aux accents féministes. Sous son apparente frivolité, la pièce aborde ainsi les notions de consentement, de libre choix, mais fustige également les dérives du patriarcat. Des thèmes bien ancrés dans l’actualité, surtout avec la situation au sud de la frontière.

UNE ADAPTATION ÉCLATANTE
La pièce repose sur une série de chassés-croisés où chaque membre de la distribution brille à sa façon. Sandrine Brisson est désopilante en mère de famille, tête forte sans manière, ni subtilité. La comédienne livre une prestation comique et vulnérable. À ses côtés, Claude Poissant (Monsieur Bennet) est une force tranquille plus nuancée.
Stéphanie Arav (Élizabeth) et Thomas Derasp-Verge (Darcy) forment un charmant duo. Leur détestation initiale n’a d’égale que la force de leur attachement. Caroline Bélanger (Jane), Flavie Bourgeois (Kitty) et Lamia Benhacine (Charlotte) sont le trio fougueux de la troupe, ingénues et frivoles. Tout un contraste avec Marie-Pier Labrecque (Caroline Bingley) en bourgeoise détestable.
Maxime Isabelle (Mr. Collins), Félix Lahaye (Charles Bingley) sont des jeunes galants maladroits et Philippe Thibault-Denis (Wickham) un fin manipulateur.

La synergie du groupe est sans aucun doute le ciment de la pièce. Les comédien·ne·s débordent d’une énergie contagieuse, courent dans tous les sens, virevoltent dans des froissements d’étoffes et de costumes. Au-delà de leurs jeux, ils/elles nous éblouissent dans de surprenantes chorégraphies. C’est sans compter une ingénieuse scénographie qui renforce le plaisir des yeux.
Orgueil et préjugés est la belle surprise de ce printemps, un coup de cœur inattendu. Après Une nuit des rois déjantée, le duo Bélanger/Déraspe récidive, en nous invitant à (re)découvrir une œuvre intemporelle. C’est drôle, tendre et plein de bons sentiments. L’anti déprime par excellence, qui, durant 1h50, nous emporte dans un tourbillon d’émotions. Un vrai bouquet de fraîcheur qui fera chavirer les cœurs !
Orgueil et préjugés
Théâtre Denise Pelletier jusqu’au 11 avril 2025
De Jane Austin
Adaptation : Rébecca Déraspe
Mise en scène : Frédéric Bélanger