L’autrice-compositrice et interprète Andréanne A. Malette nous invite, du 4 au 6 mars, à un spectacle virtuel unique dans lequel elle soufflera la toute première bougie de son plus récent album, SITKA. Pour en savoir davantage sur ce qui nous attend dans ce spectacle créatif, nous avons échangé avec l’artiste.
Pour ton album SITKA, qui fête sa première bougie cette année, tu as décidé de créer un évènement spécial pour souligner la création de cet album. Qu’est-ce que cet album a de si particulier pour que tu prennes le temps de le souligner dans un spectacle virtuel ?
En effet, c’est plutôt rare qu’on fête un an. Normalement, on attend un vingt ans avant de le fêter, mais ce SITKA est sorti en pleine pandémie et n’a pas eu la chance d’avoir son lancement officiel, donc je voulais lui donner un second souffle, un relancement en fait. On a fait ça tellement intensément avant la sortie de l’album il y a un an. J’ai porté tous les chapeaux, j’ai fait l’album de A à Z avec Antoine Lachance , mon coréalisateur. Puis, on a travaillé jusqu’à la toute dernière minute pendant un mois le nez très très collé sur le projet. Après ça, il est sorti tout de suite. Donc, on n’a jamais pris une espèce de pas de recul pour pouvoir se dire : Qu’est-ce qu’on vient de faire? De cœur pesant à SITKA, c’est un peu ça. C’est une discussion entre Antoine et moi. On parle de l’album. Il y a plein d’anecdotes de studio là-dedans et des révélations sur ce qui se cache en arrière des chansons. Bref, on décortique l’album pour le présenter et on fait les chansons live entre chacune des discussions. C’est comme une espèce de souvenir de ce qui s’est passé dans la création de SITKA.
Pourquoi avoir choisi l’option virtuelle plutôt que présentielle ?
C’est un autre projet qui est complètement différent de la tournée et, pour moi, c’est un médium qui n’est pas un médium par défaut. Faire un spectacle virtuel ne veut pas dire qu’on ne peut pas aller en salle, c’est une autre sorte d’œuvre à mon sens. J’adore travailler avec ce médium-là et les caméras. Comme j’ai étudié en cinéma, il y a quelque chose de très très intéressant pour moi de présenter mes chansons de cette façon-là. Puis aussi, on va présenter dans le spectacle des trucs qui ne sont pas en présentiel. J’ai des audios de mes premières maquettes, on a du visuel de ce qu’on a fait en studio, donc ça devient vraiment plus intéressant au niveau montage que si ça avait été fait sur scène.
Penses-tu que le virtuel apporte une liberté supplémentaire que l’on ne retrouve pas forcément dans les spectacles traditionnels ?
Complètement ! Puis l’un n’empêche pas l’autre. De cœur pesant à SITKA, c’est vraiment un projet à part entière. C’est un moment dans le temps qui ajoute à l’album et qui ajoute à la tournée.
Est-ce que ta tournée a influencé la création de ce spectacle ?
Ah oui, c’est sûr! Entre mes chansons j’explique un peu le processus créatif durant la tournée, fait que c’est sûr qu’il y a quelques idées qui s’y retrouvent. Par contre, je vais vraiment plus profondément dans l’explication des chansons, comme Alaska, entre autres, qui a été créée parce qu’on cherchait à faire des sons intéressants. On est arrivé dans la cuisine d’Antoine avec une canette de liqueur soda stream et un fromage et on a créé le beat! Pour le public, c’est intéressant de savoir que cette chanson-là est finalement juste un un party de cuisine! Il y a des choses cachées un peu partout dans l’album que juste Antoine et moi savions juste jusqu’à ce jour, mais maintenant tout le monde va être au courant, et il n’y a pas ça dans la tournée.
Penses-tu que le fait de partager la genèse de tes chansons va te permettre d’amener ton écriture ailleurs ?
Bonne question! Peut-être que les gens vont avoir un regard différent sur ce que j’ai écrit. En même temps, je ne veux pas me livrer trop parce que je ne veux pas que les gens aient de l’empathie pour moi si je leur explique l’histoire derrière. Je veux qu’ils continuent de se l’approprier justement.
Parallèlement, est-ce que tu penses que trop dévoiler le processus créatif d’un artiste peut être un danger ?
Je pense que oui parce qu’on veut que les gens continuent à entendre la chanson comme elle les touche eux, mais c’est sûr que de décortiquer comme ça, je pense que ça fait en sorte que je deviens de plus en plus efficace quand j’écris sur des sujets qui me parlent et qui me touchent personnellement. Je suis rendue bonne pour écrire pour les autres aussi, fait que ce regard-là sur la création, qui est plus extérieur, me permet d’être meilleure dans ce que je fais.
Justement, comment fais-tu la différence quand la chanson doit appartenir à quelqu’un d’autre par rapport à toi ?
Le processus est différent parce que si je sais que c’est quelqu’un d’autre qui va la chanter, j’ai beaucoup moins de censure. Je fais beaucoup plus appel à mon empathie et à mon écoute. Je vais écouter d’autres personnes parce que souvent je vais puiser dans ce qu’elles vont me raconter. J’ai zéro égo dans ce temps-là aussi, il y a des mots qui ne sont pas les bons et qu’on change pour que la personne soit à l’aise. Il y a ça quand quelqu’un d’autre interprète, mais aussi des fois c’est moi qui interprète l’histoire de quelqu’un d’autre, puis je me l’approprie, fait que ça devient un peu tout mélangé! Je pense qu’il n’y a aucune de mes chansons qui soit 100% la vérité. C’est toujours une émotion, pis j’en fais une histoire. Fait qu’il y a du vrai et il y a de l’inventé. Je puise dans plein d’affaires.
Ton spectacle virtuel s’intitule De cœur pesant à SITKA qui fait référence à ta chanson Cœur léger qui est sur ton dernier album. Est-ce que c’est une manière subtile de dire que quand tu reviens de cet endroit-là, tu as le cœur plus léger ?
Oui! En fait, depuis que j’ai fait cet album-là, j’ai le cœur plus léger. Je cherchais à trouver un titre qui explique un peu le voyage personnel que j’ai fait du cahier d’écriture à SITKA, de la base à l’album. Je pense que c’est tellement un album émotif et introspectif pour moi que De coeur pesant à SITKA voulait tout dire pour moi. En fait, SITKA un laisser-aller.
Dans ton spectacle, tu seras accompagnée d’Antoine Lachance avec qui tu collabores depuis plusieurs années. Qu’est-ce qu’il apporte à ta musicalité selon toi ?
Je suis très très instinctive, et lui aussi d’ailleurs, mais j’ai moins de connaissances théoriques au niveau de la musique que lui. Antoine a étudié là-dedans, donc on se complète à ce niveau-là. C’est un gars qui a plein d’idées! Souvent, je vais partir avec quelque chose puis avec les connaissances qu’il a, il va m’amener ailleurs, et ça, c’est super le fun, c’est un plus. Puis, il est hyper créatif, hyper talentueux, il joue de tout, il a un studio et il est super à l’aise avec les logiciels d’enregistrement et tout. Pendant plusieurs années, à force de porter plein de chapeaux, j’ai pensé qu’il fallait que je sache très bien tout faire, jusqu’à ce que je comprenne que je n’avais pas besoin, que j’avais juste à m’entourer. Je n’ai pas été trop loin, j’ai juste demandé au gars qui était à ma gauche chaque fois qu’on fait des shows puis qui est un super bon ami. On s’est rendu compte qu’on travaillait bien ensemble et qu’on était un très très bon duo.
Pour toi, est-ce qu’une chanson doit toujours être accompagné d’un décor pour prendre vie?
C’est une super bonne question parce que ça me fait réaliser que j’écris beaucoup en images. J’ai des textes devant moi, et juste en lisant le titre, je sais où je suis. Avec Cœur léger , je suis sur le bord de la mer. Sur Le brasier , je suis dans une maison. L’étranger, c’est aussi au bord de la mer, Je ne vais pas toutes les nommer, mais, vraiment, dans ma tête, il y a un lieu et probablement que ça se ressent dans chacune des chansons. Si je regarde mes 3 albums, toutes mes photos sont toujours toujours dehors.
Dans ton dernier album, tu abordes des thèmes qui te touchent particulièrement comme le deuil et la violence conjugale. Est-ce que tu décides le thème sur lequel tu veux écrire directement ou c’est l’écriture qui te dirige vers un thème ?
Ça dépend de la chanson. Il y a des chansons comme Le brasier, par exemple, où je savais que je voulais écrire sur ce sujet-là depuis 2015. J’avais lu le livre Le monstre d’Ingrid Falaise et je voulais faire une chanson sur ce sujet, mais ça aura pris 5 ans avant que finalement les mots se placent sur le papier. Puis, il y en a d’autres qui viennent tout seules. Si on parle de Bateau en papier , ça a commencé par une petite chanson d’amour puis, en cours de route, je me suis rendue compte que ce n’était pas ça, donc la chanson a pris comme une autre autre tournure qui est devenue beaucoup plus personnelle. Finalement, ça explique mon processus de libération, de délestage que j’ai fait en Alaska. Parfois, la chanson veut dire quelque chose, mais ça passe par-dessus ce que j’avais pensé que c’était.
Avec le recul, est-ce que tu penses que la pandémie a changé quelque chose dans ta création ?
Complètement, entre autres au niveau de la réalisation. Au début, je cherchais un réalisateur puis quand tout a lâché, je me suis dit que j’allais le faire toute seule. C’était le moment ou jamais d’aller au bout de mes idées et d’essayer des affaires. La culture s’est arrêté, on était en confinement. Je suis donc allée me confiner avec Antoine pour faire de la musique. C’est sûr que ça n’aurait pas été comme ça si ça avait été dans les mains de quelqu’un d’autre. Au niveau créatif aussi, c’est sûr que l’album est plus introspectif. On avait juste ça à faire de se poser des questions et de se regarder à l’intérieur, fait qu’il est teinté d’une période beaucoup plus vulnérable que les autres albums.
Depuis plusieurs années, tu signes la mise en scène du spectacle Jamais trop tôt. Qu’est-ce qui change dans le processus de créer un spectacle pour les autres plutôt que pour soi ?
C’est le fun, surtout avec eux autres. J’ai 24 jeunes de 14 à 17 ans et il faut monter une espèce de gros show de variété avec un peu de théâtre entre les chansons. Il y a des chorégraphies, il y a des harmonies vocales, il y a des décors, des éclairages. Comme j’ai touché à plein de médiums d’arts différents, ça crée une espèce de toiles d’araignées dans ma tête puis j’arrive à utiliser mes talents et mon background de danseuse et de musicienne pour faire les chorégraphies et les harmonies. C’est comme si tout prend son sens quand je fais de la mise en scène. Si on veut, je crée une œuvre, mais je peux la regarder d’un œil extérieur et j’ai un plaisir immense à m’asseoir dans la salle et voir le spectacle. Je n’ai pas le même stress, je suis à la fois stressée de présenter quelque chose que j’ai créé, mais je ressens aussi le grand bonheur de les regarder aller, ça leur appartient. J’adore vraiment faire ça.
Qu’est-ce que les jeunes t’apportent dans ton processus créatif ?
Parfois, on entend des choses sur les nouvelles générations, mais je trouve les jeunes extrêmement brillants et extrêmement allumés. Chaque année, je rencontre des jeunes qui sont motivés, qui veulent faire ça et qui sont ouverts d’esprit. On a 5 jours pour monter un gros show. En réalité, c’est 3 jours parce que le jour 4, c’est la générale. Ils sont très motivants et ils me poussent à continuer à être aussi travaillante qu’eux. Souvent, ils en savent plus que moi sur bien des affaires, donc ça devient vraiment un échange. Je prends autant que je donne dans ce projet, fait que ça fait du bien.
Pour assister au spectacle virtuel De cœur pesant à SITKA d’Andréanne A. Malette, rendez-vous sur le site officiel de l’artiste.