Laurence Jalbert, d’une intensité vraie

Le 9 juin dernier, dans le cadre du trentième anniversaire des FrancoFolies de Montréal, Laurence Jalbert a offert un concert de 90 minutes devant des festivaliers plus que comblés d’entendre un bon nombre de ses plus grands succès. À travers cette rétrospective de plus de 42 ans de carrière, la Gaspésienne a aussi pris le temps, dans toute sa spontanéité légendaire, de partager ses découvertes musicales, son amour indéfectible pour le country ainsi que ses réflexions fort intéressantes sur le monde qui nous entoure.

Accompagné par un soleil radieux s’éteignant tranquillement et la douce fraîcheur du vent, le public a instantanément plongé avec enthousiasme dans l’univers authentique de cette belle rousse auteure-compositrice-interprète qui a débuté le voyage avec la très à propos Ma route. À l’intérieur des 20 premières minutes, les spectateurs sont passés du rire aux larmes en criant avec cœur et sans le moindre accro les refrains de Qui est cet homme?, Corridor, Encore et encore, Je pars à l’autre bout du monde de Paul Daraîche (unique chanson de son répertoire qu’elle n’a pas elle-même écrite et composée), Les anges dansent et Bella. Même après avoir sorti plus de onze albums (le douzième est en préparation), Laurence Jalbert semblait très émue de voir ceux qu’elle surnommait tendrement ses anges connaître ses pièces, surtout que le public était littéralement composé de gens âgés entre 7 et 77 ans.

Celle qui planche également par les temps qui courent sur l’écriture de son deuxième roman à saveur autobiographique n’a rien perdu de sa fougue et de son intensité. Hier encore, elle n’a pas cherché à les contrôler, et c’est exactement cela qui a fait tout son charme. C’était particulièrement incroyable de voir à quel point son adorable et hilarant sens de l’autodérision ne l’empêchait pas, deux secondes plus tard, d’être entièrement habitée par les puissantes émotions qui émanent de Encore et encore, Au nom de la raison, Comme tu me l’as demandé de Serge Lama et la touchante et tellement vraie Évidemment qu’elle a dédiée à la mémoire de France Gall. Le rauque inimitable de sa voix se mariait parfaitement à ses notes aiguës.

Au-delà de ses sublimes prouesses vocales, sa personnalité immensément attachante valait le détour. Sans complexe, elle s’est permise de commenter, parfois même à l’intérieur de ses chansons, des sujets d’actualité qui la touchent comme le G7 et la violence faite aux enfants. Elle a également abordé sans gêne les coulisses de l’industrie de la musique. Elle a d’ailleurs exprimé qu’elle aimerait bien que feu son ami Gaston Mandeville reçoive des hommages de la part de ses pairs au même titre que les Leonard Cohen et Pauline Julien de ce monde. Elle a aussi soulevé l’extrême importance d’appuyer les artistes qui sont révélés au grand public à l’issu de concours comme La Voix, car c’est après l’aventure qu’ils ont réellement besoin de nous. Comme elle l’a si bien dit, en matière de culture et de reconnaissance à l’international :  »On n’est pas n’importe qui, les amis! »

C’est pourquoi, depuis deux ans, Laurence appuie considérablement la carrière d’un chanteur country de 22 ans du nom de Tommy Charles. Présent hier soir à titre de musicien avec Daniel Lacoste, Éric Sauvé et Christian Péloquin, Tommy a ébahi le public avec sa voix suave pleine de nuances. Il a pu se démarquer lors d’un medley country englobant des classiques de ce genre musical traduits en français comme Cet anneau de feu. Pour clore la portion country du spectacle, Laurence a interprété son immense succès radiophonique Jeter un sort, qui, à l’époque de sa sortie dans les années 2000, était considéré comme une opération suicide. Elle a aussi offert avec joie Je me sens bien auprès de toi, sa chanson balancine. Elle la baptise ainsi puisque, lorsqu’elle était une petite gamine d’une timidité maladive, elle s’assoyait sur la balançoire de dos aux gens et chantait à tue-tête cette chanson en pensant que personne ne la voyait! Les spectateurs ne se sont pas fait prier pour scander eux-aussi à tue-tête le ver d’oreille Oh yepe yepe yep qui orne le morceau.

Un autre moment marquant de ce spectacle a sans contredit été la livraison de Tomber, cette pièce culte qui, à l’instar de sa généreuse interprète qui est ce qu’elle pense, nous donne envie d’accueillir l’amour à bras ouverts sans se soucier de rien.

Crédits Photos : Stéphanie Payez/Éklectik Média