Chu rendue là de Lise Dion, Fuckoff de Maxim Martin et maintenant Aller de l’avant de Mario Jean. Nous sommes dans une ère où les humoristes s’assument. Assumer leurs défauts incorrigibles et leurs forces indémodables. Assumer qu’ils sont bien dans leur niche d’humoriste qu’ils ont bâtie depuis des décennies sans avoir le besoin de se réinventer pour accoter la nouvelle génération. Assumer leur public cible. Assumer d’explorer des thèmes plus communs mais avec une personnalité propre. Et ça fonctionne merveilleusement.
En ce premier jour du mois de novembre où les violentes rafales de vent causaient des dommages et des pannes électriques un peu partout dans la province, Mario Jean a eu la chance de ne pas devoir annuler son spectacle prévu à l’Étoile Banque Nationale du DIX30. Une salle presque comble l’attendait avec une profonde envie d’oublier le froid en riant de bon cœur. Et c’est exactement ce qu’ils ont fait. Cette atmosphère détendue et rassembleuse ne s’est pas estompée de la soirée. Il faut dire que le sixième one man show offre un divertissement réconfortant et réjouissant. Le public s’est plu à se moquer et à se libérer sans lourdeur de ses petites imperfections au même rythme que Mario Jean embrassait les siennes avec un abandon et une sincérité alléchants.
La ligne principale d’Aller de l’avant est bien simple : avancer malgré les régressions de la société. Maintenant âgé de 54 ans, celui qu’on peut voir dans la comédie télévisée Léo accepte ses mauvaises habitudes et sa mauvaise foie. Avec une aisance scénique remarquable, il s’est confié sans prétention sur les choses qui l’irritent dont la glorification de l’imbécilité avec des émissions du style Docteur, suis-je normal?, le yoga, les connaissances de longue date qui sont insistantes sur Facebook , faire l’amour sous la douche et vivre le moment présent. Des thématiques qui reviennent dans la plupart des spectacles d’humour, mais qui, grâce à l’expérience de Jean et à son utilisation efficace d’observations précises auxquelles tous peuvent s’identifier, faisaient tout de même mouche à presque tous les coups.
Alexis Laurence de Lex Studio a conçu un décor simple mais saisissant mettant en vedette une unique flèche changeant régulièrement de couleur. Une belle métaphore sur l’intention du spectacle qui conférait également une jolie intime entre l’artiste et les spectateurs. Dans cet espace épuré, l’accent était mis sur les déplacements de l’humoriste qui signait ses textes et sa mise en scène en cavalier seul. Ces choix insufflaient au spectacle un naturel rafraichissant qui renforçait la complicité entre l’artiste et la salle. Les mimes que l’artiste effectuait permettaient de bien s’immiscer dans les anecdotes.
Parmi les autres sujets abordés, Mario Jean a manifesté son souhait de sacrer moins, sa jarre l’empêchant de jurer bien en vue, pot qu’il a évidemment généreusement garni à des moments ciblés judicieusement. Avec un sens du timing irréprochable, il a raconté un voyage dans le Sud qui a très mal commencé puisque la valise de sa blonde a été égarée à l’aéroport. Le segment sur la retraite a également été bien applaudi. La blague sur l’attrait soudain envers Les Résidences Soleil était bien élaborée. Les craques sur Pierre-Yves McSween, cet économiste qui fait l’amour pas par plaisir mais parce que ça chauffe la maison, ont suscité bien des rires grâce à leur originalité. Évidemment, Mario Jean a mentionné les différences générationnelles entre lui et ses enfants. Les situations vécues avec ses deux gars vivant encore à la maison ne s’écartaient pas des clichés d’usage, mais les expressions faciales de l’humoriste compensaient. Les détails concernant la façon comment un de ses garçons a interrompu des ébats sexuels plutôt réjouissants et bien entamés valaient le détour.
Évidemment, on n’échappe désormais plus à la mention de la notion du consentement. L’artiste a exprimé son désarroi, son exaspération et sa frustration envers le comportement de certains hommes qui ne comprennent pas la définition du mot non. Pour faire valoir son opinion, il a émis une recommandation fort sage sur le fait que si un gars n’acceptait pas qu’une femme change d’avis, il serait mieux de ne jamais se marier! Après une ovation méritée, Mario Jean a reçu une belle surprise : un billet d’argent soulignant les 25 000 billets déjà vendus de cette présente tournée! Pot à sacre et plaque à la main, il a quitté la scène satisfait que tous les efforts qu’il met au service de son talent puissent encore procurer tant de bonheur aux gens.
Aller de l’avant sera en tournée partout dans la province dont le 20 janvier 2020 à la Salle Albert-Rousseau à Québec et le 28 février 2020 à Longueuil. Tous les détails ici!
Crédits Photos : Angéline Gosselin, Éklectik Média