Ariane Moffatt sous un ciel incarnat au FestiVoix

Après la pluie, le beau temps. L’adage ne peut pas être plus vrai pour le FestiVoix de Trois-Rivières qui, depuis le début de sa vingt-septième édition, subit les déluges avant le commencement des spectacles. Le baptême de festivals pour la tournée Incarnat, le septième album original d’Ariane Moffatt, n’y a pas fait exception. Fébrile et reconnaissante, l’auteure-compositrice-interprète a proposé aux festivaliers attentifs un nouveau spectacle dans lequel douceur, joie, intensité -et humidité- s’envoyaient brillamment la balle.

Entourée du chant des oiseaux, de fumée et du splendide Fleuve Saint-Laurent, l’ancienne juge à La Voix et professeure à Star Académie 2021 a d’emblée illustré ce contraste en se présentant sur scène avec des lunettes de soleil blanches et une combinaison en jean lui donnant des allures de rockstar pour interpréter au piano une pièce instrumentale, La classe, dont le titre fait allusion à son studio de création personnel qui est en réalité situé dans une école.

Être seule sur scène dans une formule acoustique était déjà dans les plans d’Ariane Moffatt avant la pandémie. Elle voulait souligner les vingt ans de son premier album, Aquanaute, de manière intimiste. C’est ainsi que de nouveaux textes ont germés, donnant naissance à un album imprégné d’une atmosphère planante et épurée qui a bercé bien des gens pendant la pandémie. Après un spectacle en mai dernier dans le très à propos Théâtre Corona à Montréal pour tester le matériel tout chaud, l’interprète a semblé un peu nerveuse mais surtout en confiance et excitée de le dévoiler maintenant à l’extérieur.

Accompagnée de séquences musicales et d’enregistrements de sa voix pour les back vocals, elle a magnifiquement offert la douce-amère Distance avant d’entamer Debout, un succès qui a connu une seconde vie pendant les nombreux confinements. «Ça vaut la peine de rester debout, regarde.» a-t-elle spontanément lancé en pointant le public assis.

D’autres morceaux d’Incarnat ont jailli de sa sublime voix aux multiples nuances et émotions dont Beauté, un hymne à la culture qu’elle a livré à fond en étant investie, passionnée et passionnante. Cette intensité d’exécution dans des pièces dépouillées d’artifices impressionnait et séduisait. Ariane Moffatt a aussi démontré son incroyable talent de musicienne en fusionnant habilement les mélodies existantes avec d’autres accrocheuses notes de piano.

Par la suite, place à des deux somptueuses et bouleversantes reprises : Imparfait, une pièce de Daniel Bélanger qu’elle a reprise dans son album Le coeur dans la tête et qu’elle a magnifiquement fait sienne depuis, et Famous Blue Raincoat d’un de ses mentors Leonard Cohen qui possédait ce don d’offrir des paroles pouvant être interprétées de milliards de façons mais qui finissaient toujours par faire pleurer tout le monde. Lors de ces deux chansons, Ariane Moffatt a accouché d’envolées vocales puissantes qui donnaient de longs frissons.

La portion plus douce du concert a aussi fait place aux excellentes Jamais trop tard (originellement un duo avec Lou Doillon), Phèdre en forêt signée Fanny Britt, La fille de l’iceberg et Incarnat, une pièce solennelle où la voix parlée et les murmures d’Ariane Moffatt a donné lieu à un moment de recueillement rempli d’espoir. Avec le Musée des Ursulines juste derrière, cette tendre prière rehaussait la sensation d’être en communion, en thérapie de groupe comme l’artiste l’a si bien déclaré.

En voyant le parterre hésitant de se lever et de danser à cause des mesures sanitaires, elle a lancé pour faire réagir «Pensez pas que j’aurai juste fait un show solo de piano là!» au cours d’un segment avec des synthétiseurs honorant l’album bilingue MA. Insufflant une bienvenue vibe DJ set, elle a étonné avec une version 2.0 de Mon Corps avant d’enchaîner avec Hôtel Amour et Walls of the World. À partir de ce moment, elle a tout mis en place pour faire participer le public le plus activement possible, comme en témoigne les tapements de main et le micro tendu vers le public qui n’avait plus trop le choix de se laisser aller sur le beat de la libératrice Nature.

Bref, tout au long de la soirée, Ariane Moffatt s’est amusée follement, acceptant les petites erreurs en les transformant en blague. Ce bonheur contagieux a connu son apogée lors des rappels qui englobaient trois de ses plus grands succès commerciaux qu’elle a habillés de guitare électrique et de tambour bas  : Réverbère, Pour toi dans une délicieuse version rock et Je veux tout qui a fait la joie des enfants près de la scène qui chantaient sans la moindre hésitation.

Ariane Moffatt sera en tournée un peu partout au Québec cet été et cet automne. Cliquez ICI pour voir toutes les dates.

Crédits Photos : Stéphanie Payez, Éklectik Média