Le Bodyguard : un passage au théâtre réussi

Après Annie, La mélodie du bonheur et Rock of ages, voilà que l’Espace St-Denis acceuille jusqu’au 15 avril l’adaptation québécoise de la comédie musicale The Bodyguard.

Frédérick De Grandpré y effectue son grand retour au jeu en incarnant le rôle-titre, c’est-à-dire le garde du corps Frank Farmer. Une nouvelle venue, la fort talentueuse Jennifer-Lee Dupuy, lui donne la réplique dans le rôle de la popstar Rachel Marron qui a besoin de sa protection depuis qu’un admirateur (Tommy Durand) lui envoie des menaces de mort et a dérobé une de ses robes de scène dans sa loge.

D’ailleurs, Tommy Durand, sans dire un seul mot, traduit à merveille grâce à des chorégraphies contemporaines, l’état mental instable de son personnage.

Bodyguard

Comme cette pièce puise ses inspirations dans le film romantique culte Le Bodyguard ,mettant en vedette Whitney Houston et Kevin Costner, les attentes étaient élevées.

Les nombreux artistes présents pour la première médiatique qui a eu lieu le 6 avril ont semblé avoir été comblés par le dynamique travail de mise en scène de Joël Legendre, les performances vocales de l’ensemble de la distribution et les chorégraphies endiablées imaginées par Steve Bolton.

Si Le Bodyguard a réussi à être le succès populaire qu’on connaît, c’est principalement parce que ces personnages centraux sont attachants et sympathique. L’idylle entre Rachel Marron et Frank Farmer possède juste ce qu’il faut de magie et de drame pour faire rêver.

À cet égard, le tandem Dupuy-De Grandpré réussit le pari. Les deux interprètes partagent une chimie crédible et attrayante. Malheureusement, leur relation tendue du premier acte se transforme trop rapidement en sentiments amoureux. Il manque quelques scènes d’échanges pour que ce soit plus réaliste.

Au-delà de cette belle histoire d’amour au dénouement doux-amer, ce n’est pas la trame narrative du Bodyguard qui fait en sorte que le public se rue au théâtre et que des supplémentaires ont été ajoutées au St-Denis à partir de novembre prochain. C’est pour entendre certaines des plus grandes oeuvres du répertoire de Whitney Houston et se remémorer la belle époque des années 90. À ce niveau, la production ne déçoit pas.

Plusieurs chansons de la regrettée diva figurent au programme de la soirée , et pas seulement celles contenues dans le film de 1992. Impossible de ne pas sourire et fredonner en entendant Queen of the night, Million dollar bill, I wanna dance with somebody et I’m every woman. Même qu’il est difficile de contrôler l’envie de se lever de son siège et danser au rythme des comédiens qui se démènent avec fougue. Surtout lorsque le jeune Roman Viau Diadhiou, qui campe Fletcher, le garçon de dix ans de Rachel, fait des mouvements de break dance absolument incroyables.

Si les numéros sont à ce point mémorables, c’est en grande partie grâce à l’exceptionnel travail de Jennifer-Lee Dupuy. Les bottes métalliques à talon aiguille étaient difficiles à chausser, mais la jeune interpète a su devenir Whitney pendant plus de 90 minutes, autant vocalement que physiquement.

Les costumes de l’Atelier Violi et de Léa Lisa Lurette sont tout simplement saisissants de vérité. Des répliques irréprochables des looks mythiques de la grande chanteuse. Jennifer-Lee Dupuy les enfile avec énergie et grâce.

 

 

 

Sur toutes les chansons que l’interprète livre pendant le spectacle, elle parvient à donner des frissons. Que ce soit derrière le piano pour une version acoustique irrésistible de Greatest love of all ou en tandem avec la stellaire Sharon James, qui campe la soeur de Rachel qui ne supporte plus de vivre dans son ombre, sur Run to you, Jennifer-Lee Dupuy brille et impressionne.

Si les pointes d’humour véhiculées par la mignonne relation entre Frank et Fletcher et les sautes d’humour mélodramatiques de l’attaché de presse Sy Spector (Matthieu Lévesque) atteignent la cible, les moments plus dramatiques, en revanche, manquent cruellement de réalisme. Les émotions atteignent davantage le public lorsqu’elles sont chantées sur I will always love you et I have nothing que pendant que les comédiens doivent simuler des crises de larmes. Le ton est presque risible par moments.

L’acteur qui s’avère le plus juste lorsqu’il est question de doser humour et drame est Frédérick De Grandpré qui surprend dans ce rôle-titre. Il livre une prestation sobre et nuancée. On sent bien que le personnage lutte avec ses démons et que l’arrivée imprévue de Rachel dans son existence lui procure de la joie, mais aussi d’autres dilemnes moraux. Ceci dit, l’interprète a plus de mal à se glisser dans la gestuelle d’un garde du corps crédible. Une main qui hissée dans les airs ne suffit pas pour que le public croit qu’il s’agit d’un des gardes du corps les plus futés au pays…

Il est toujours possible de se procurer des billets pour les représentations de la pièce à Montréal en cliquant ici.

Crédits Photos : Angéline Gosselin, Éklectik Média