Le cri du rhinocéros : encore des rugissements svp!

L’animateur, acteur, humoriste, scénariste et réalisateur Marc Labrèche ajoute une corde à son arc avec Le cri du rhinocéros, un documentaire dont il assure la narration, les entrevues, le scénario et la réalisation. Cette oeuvre d’une cinquantaine de minutes s’attarde avec originalité et naturel à l’inépuisable sujet qu’est la création, plus précisément sur l’existence ou non d’une date de péremption de la pertinence d’un créateur.

Malgré tout le talent d’un artiste, est-ce qu’il vient un temps où il a tout offert ce qu’il avait à offrir? Est-il condamné à la répétition? Est-ce que ses meilleures créations apparaissent seulement au début de sa carrière ou l’expérience peut donner lieu à un trésor insoupçonné? Est-ce réellement possible de se réinventer et de sortir du carcan de la signature? Fasciné et habité par ce type de questions, l’animateur de Cette année-là  a eu envie de les décortiquer humblement et franchement en compagnie d’une impressionnante et éclectique brochette de cinéastes et d’auteurs canadiens, québécois, américains et français regroupant notamment Denis Villeneuve, Xavier Dolan, Daniel Bélanger, Alexandre Jardin, Atom EgoyanPatrice Leconte, Frédéric Beigbeder, John Irving , Charlotte Gainsbourg et Ariane Moffatt

Ce n’est pas l’étiquette de documentariste qui empêche Marc Labrèche de perdre son inlassable signature déjantée, bien au contraire. Il truffe sa trame narrative de moments délicieusement absurdes comme la présence d’extraterrestres lisant  tranquillement un journal dans un café huppé. Parfois, cela brise le rythme mais, la plupart du temps, les instants d’humour permettent une meilleure compréhension des thématiques  certes complexes mais ô combien accrocheuses.

La principale force du Cri du rhinocéros réside justement là : dans le fluide contraste entre convivialité et frivolité. Évidemment à l’aise, l’intervieweur interroge avec une passion sincère  -et sans petits cartons-  des artistes qu’il apprécie visiblement dans le confort d’un atelier de création, d’un studio d’enregistrement ou d’un salon de thé. L’habile montage des entrevues attirera les spectateurs de par sa diversité et son dynamisme. Les réponses bien souvent déconcertantes des artistes ne tombent jamais dans la redondance, ce qui permet au public d’avoir sa propre opinion et d’être l’unique juge de la pertinence et véracité des propos émis, ce qui, bien sûr, s’inscrit parfaitement dans l’intention première de ce documentaire. 

Marc Labrèche ne fournit  d’ailleurs pas de réponses claires, et c’est exactement ce qui distingue Le cri du rhinocéros. Malheureusement, le format d’une heure entraîne des coupures déchirantes qui nous font espérer une suite. D’autres enjeux, comme la popularité et le besoin de se nourrir trois fois par jour malgré des œuvres moins alléchantes, ne sont abordés qu’en surface alors qu’ils regorgent de potentiel. Les raisons qui ont mené Labrèche à choisir ces artistes plutôt que d’autres de même que ses propres réflexions sur le sujet auraient également été des filons plus qu’intéressants à exploiter.

Le cri du rhinocéros sera présenté sur les ondes d’ICI RADIO-CANADA TÉLÉ ce soir, le mardi 27 novembre à 21h00. Il sera en rediffusion sur ICI ARTV le 14 janvier 2019 à 20h30 et sur ICI RDI le 3 mai 2019. Le documentaire sera également disponible sur la plateforme d’ICI TOU.TV.

Crédits Photos : ICI RADIO-CANADA TÉLÉ