Les histoires effrayantes sèment l’horreur dans le noir

Cet été,  le réalisateur norvégien André Øvredal et l’illustre réalisateur mexicain Guillermo del Toro présentent Les histoires effrayantes à raconter dans le noir. Le concept de ce film d’horreur est venu d’une série de livres d’enfant controversés du même nom de l’auteur américain Alvin Schwartz. Le point focal de cette première collaboration a été placé sur la fascination commune des deux réalisateurs: les monstres. Guillermo del Toro et les frères Hageman ont été les scénaristes alors qu’André Øvredal a été le réalisateur.

La distribution du film est majoritairement composée de jeunes acteurs. Le public peut notamment y retrouver Zoe Margaret Colletti (Stella Nicholls), Austin Zajur (Chuck Steinberg), Gabriel Rush (Auggie Hilderbrandt) et Michael Garza (Ramón Morales). Dans l’ordre des personnages secondaires, il y a aussi Dean Norris (Roy Nicholls), Gil Bellows (le commissaire Turner) et Lorraine Toussaint (Lou Lou). Quant à la bande sonore, Marco Beltrami et Anna Drubich ont composé la musique d’ambiance. La chanson thème est une interprétation de Season of the Witch, un classique de Donovan, par la célèbre Lana del Rey. Celle-ci sera publiée avec le film. La date de sortie officielle des Histoires effrayantes est le 8 août.

Rien de nouveau est apporté à l’horreur. En effet, ce film ne manque de toucher à certains des plus grands clichés du genre. Cependant, la finesse sous laquelle ceux-ci sont présentés élève le statut des Histoires effrayantes à celui d’un hommage de première qualité. L’année est 1968. La guerre du Viêt Nam poursuit ses ravages à pleine intensité et Richard Nixon devient un favori pour l’élection présidentielle. Les spectateurs sont amenés à la petite ville américaine de Mill Valley où vivent un groupe de quatre bons amis. En partant, ce préambule rappelle déjà les romans de Stephen King et la série Stranger Things. Le soir de l’Halloween est venu et les jeunes déguisés décident de s’aventurer dans le vieux manoir hanté de la famille Bellows. Dans un sous-sol caché, la protagoniste, Stella, découvre un bouquin d’histoires effrayantes qui a été écrit par Sarah, la petite fille de la famille qui souffrait apparemment de troubles psychiatriques. Elle le ramène chez elle.

À ce moment-ci, le scénario entre dans une altération du found footage puisque le livre agit comme un portail aux horreurs du passé. Toutes les histoires sont écrites en sang et ont effectivement pris place auparavant. Plus tard, des nouvelles histoires s’écrivent toutes seules et les amis de Stella disparaissent un à la suite de l’autre. La protagoniste est incapable de brûler le livre, déchirer les pages ou même de le retourner au manoir. Elle ne peut se débarrasser de la magie noire. La première victime est Tommy, le méchant de la ville. Il se fait tuer par un épouvantail nommé Harold qui le transforme en épouvantail lui-même.

La qualité de l’horreur du film arrive à un équilibre respectable. Les jump scares, accompagnés par une bande sonore spectaculaire, sont raisonnablement utilisés pour animer l’entrée en scène des monstres. De plus, il existe une vraie allure terrifiante par rapport à la ville de Mill Valley. En partant, les petites villes sont déjà synonymes à l’isolement. Celui-ci ne devient que pratiquement absolue lorsque Stella entame sa recherche par rapport à Sarah et au livre dans l’absence de l’aide des adultes. À l’hôpital, les docteurs refusent de partager l’information médicale de Sarah sous prétexte de confidence professionnelle. Le commissaire Turner ridiculise la théorie du livre ensorcelé tout en menant une enquête sur la disparition de Tommy. Sans l’aide des adultes, les jeunes sont plus vulnérables que jamais face à la magie noire et à leurs propres histoires effrayantes.

Dans les dites histoires, tout le monde doit faire face à un monstre unique. En tant que fascination commune des réalisateurs, c’est en effet la pièce de résistance de l’horreur du film. Pour Auggie, il s’agit d’un cadavre svelte qui recherche son grand orteil. Pour Ramón, il s’agit d’une créature anthropomorphe qui peut se désassembler à volonté. Pour Chuck, il s’agit d’une femme à la laideur grotesquement horrifique qui peut exercer une accolade meurtrière. Même Sarah Bellows a eu son monstre. Il s’agissait d’un être humain, ou son grand frère Ephraim, sur qui elle a écrit une histoire plus tard. L’imagerie des monstres, perfectionnée réalistement par les practical effects chéris de Guillermo del Toro, est dotée d’une esthétique peu sophistiquée qui est distinctive du dessin d’enfant. Sous l’horreur se cache une certaine innocence tristement tourmentée.

Les histoires effrayantes peut être qualifié d’hommage pour la réflexion profonde que suscite son scénario. Son sang, sa violence et sa magie, au lieu d’être jetés à volonté dans un de ces amalgames d’incohérence typiquement commerciale, sont élaborés dans une histoire bien conçue à la beauté tragique. À l’origine, Sarah Bellows a été emprisonnée par sa famille au sous-sol sous prétexte de troubles psychiatriques. On l’accusait d’être la coupable derrière la mort de plusieurs enfants. Pourtant, elle savait bien que ces décès ont été causés par le mercure que la papeterie de sa famille libérait dans un cours d’eau avoisinant. Sa famille a choisi de garder le secret de force, alors Sarah a fait appel à la magie noire. Presque tous les monstres du film ont une forme humaine. Peuvent-ils représenter l’être humain sous sa pire laideur? En se vengeant contre les membres de sa famille, Sarah est effectivement devenue une monstre elle-même, semant la terreur jusqu’en 1968. Ceci confirme une citation de Nietzsche: Quand on lutte contre des monstres, il faut prendre garde de ne pas devenir monstre soi-même. À la fin, un certain ordre revient dans la vie de Stella, mais une lourdeur y demeure.

En somme, Les histoires effrayantes est un film extraordinaire. En dessous d’un spectacle d’horreur impressionnant, le public peut trouver moyen d’apprécier une histoire mémorable et touchante. La distribution est composée, pour la plupart, de jeunes acteurs débutant leur carrière. Ils ont tous mis en place un jeu stable et mature qui est digne du travail des scénaristes. Accompagné d’une bande sonore spectaculaire, le tout est le film d’horreur à voir pour l’été 2019.

Crédits photos: © CBS Films