Mademoiselle Julie : victime du désir

Le Théâtre du Rideau Vert reprend la pièce Mademoiselle Julie qui devait être présentée en mars 2020.

La scène se passe lors de la nuit de la St-Jean, dans la cuisine du père de Julie, Monsieur le
comte. Le décor coquet n’annonce rien du drame à venir. Sous les effets de l’alcool, Mademoiselle Julie, jeune fille en apparence joyeuse, cède à ses pulsions et séduit son valet Jean. Elle réalise qu’elle n’aurait pas dû. Dans tous ses états, face à un conflit éthique, elle décline une souffrance intense. Son être est meurtri par l’acte accompli mais celui-ci lui donne le courage de partir pour vivre enfin une liberté qu’elle ne possède malheureusement pas!

Le gros plan sur la faiblesse de l’humain face à ses désirs est exploité au maximum. Malgré le fait que l’auteur suédois August Strindberg a écrit la pièce au 19ième siècle, les thèmes traités sont toujours d’actualité. Que faire lorsque la conscience nous dicte une chose et que nous faisons l’autre? vivre avec les conséquences? Fuir? Cacher l’évènement? L’humain est bien vulnérable. Sentir monter ce désir brûlant et ne pas s’en occuper semble inhumain, assouvir ce désir et se faire croire que c’est de l’amour pour le revivre indéfiniment, c’est ce que veut Mademoiselle Julie mais Jean, complètement conditionné à sa classe, à son rôle de subalterne, continuera à entrer dans le
moule. Les classes s’affrontent dans cette tragédie où les envolées dithyrambiques sont plus
enflammées les unes que les autres.

La performance de Magalie Lépine-Blondeau est époustouflante et Jean, le beau parleur joué
par David Boutin, est terriblement crédible. Les rôles sont confondus et la fiancée de Jean, Kristin, jouée tout en justesse par Kim Despatis , est un parfait exemple de droiture et de convenance. Elle reste stoïque devant le drame qui s’est vécu entre les duellistes.

Décider de vivre sa liberté sans regrets, n’est-ce pas le vrai sens du désir et l’antidote aux conflits
intérieurs…

Mademoiselle Julie est présentée jusqu’au 16 avril 2022.
Adaptation et mise en scène : Serge Denoncourt

Crédits Photos : François Laplante Delagrave