La mémoire du coeur : un tendre hommage symphonique à Renée Claude

Pour un soir seulement, onze artistes féminines d’ici ont rendu hommage à la grande Renée Claude. La maison symphonique de la Place des Arts affichait complet pour l’occasion. Il est vrai qu’entendre Isabelle Boulay, Clémence Desrochers,Luce Dufault, Louise Forestier, Kathleen Fortin, Catherine Major, Ariane Moffatt, Marie-Denise Pelletier, Marie-Élaine Thibert et Annie Villeneuve reprendre des succès intemporels est en soit un puissant argument , mais le but premier l’était encore plus :  amasser de l’argent pour le fonds de la recherche  sur la maladie d’Alzheimer du Centre de recherche du CHUM.

L’idée de ce spectacle vient de Nicolas Lemieux, président de GSI Musique. Lorsqu’il a rencontré Renée Claude dans le cadre d’un spectacle bénéfice qu’il organisait pour venir en aide à sa marraine se battant avec un virulent cancer, il a été happé par sa gentillesse et son extrême générosité. Lorsqu’il a su que la maladie d’Alzheimer dont souffre Renée Claude depuis 2013 avait atteint le stade 7, il était si bouleversé qu’il a ressenti la nécessité de monter un projet en son honneur. Est alors née une collaboration entre 11 artistes dont Ginette Reno et Céline Dion qui ont uni leur talent sur Tu trouveras la paix de Stéphane Venne. Le concert a d’ailleurs débuté avec la présentation des coulisses de la conception du vidéoclip et évidemment le clip  visionné plus d’un millions de fois sur YouTube. Une entrée en matière à la fois touchante et sympathique qui démontrait l’affection et la sincérité des artistes impliqués. Jusqu’à ce jour, 157 414$ ont été donnés à la fondation du CHUM par le biais de cette initiative.

Sous la direction musical d’Adam Johnson, le concert enchainait les grands succès de Renée Claude de même que ceux de d’autres qu’elle a incarnés avec tant de passion. Pour ouvrir le bal, neuf interprètes ont entonné Vivre doucement. Déjà, la symbiose avec cet éventail  d’artistes diversifié et original et l’orchestration grandiose opérait et suscitait de vives émotions. La Maison Symphonique revêtait une ambiance touchante pleine d’humanité, de liberté et d’espoir, à l’image de la carrière de Renée Claude.

Après une prestation efficace et bien personnelle de Pendant Que de Gilles Vigneault, Catherine Major a été rejointe par sa grande amie Louise Forestier qui avait envie de chanter avec elle un duo qu’elle a jadis interprété avec Renée Claude, L’amante et l’épouse. Un doux moment de partage qui a été suivi par une prestation bouleversante d’Avec le temps de Léo Ferré que Louise Forestier a livrée avec une vérité et une intensité si transcendantes qu’elle a reçu une franche ovation. Les mots de Léo Ferré ont continué de résonner en la personne d’Isabelle Boulay qui a offert Est-ce ainsi que les hommes vivent avec une retenue enveloppante.

Clémence Desrochers a fait son entrée sous un tonnerre d’applaudissements pour raconter ce qu’est devenue La ville depuis. Même si le texte contenait quelques amusantes métaphores et que le public riait discrètement, l’artiste l’a livré avec une mélancolie poignante. Une deuxième ovation a pris forme! Marie-Élaine Thibert a enchaîné avec puissance avec Si tu viens dans mon pays. Ce fut ensuite le temps d’un discours inspirant de Stéphane Venne sur l’importance de remplir nos pages blanches de souvenirs , lui qui a composé plus de six albums pour René Claude. Luce Dufault, Marie-Élaine Thibert et Marie-Denise Pelletier ont interprété avec conviction l’hymne à la révolution donnant foi à une société plus ouverte , Le début d’un temps nouveau.  Dans le même ordre d’idées festif au niveau des mélodies, Marie-Denise Pelletier a déclaré avec grâce et naturel qu’elle avait fait Le tour de la terre alors qu’Annie Villeneuve, remplaçant au pied levé Laurence Jalbert, a plus que livré la marchandise au son de C’est notre fête aujourd’hui. Elle a attaqué cet ode à une jeune relation amoureuse avec vivacité et une technique vocale irréprochable.

Ariane Moffatt est ensuite apparue pour un convaincant doublé : Viens faire un tour chez moi et Berceuse pour mon père et ma mère, pièces qu’elle a réussi à parfaitement rendre siennes avec des notes tantôt puissantes tantôt éraillées et des improvisations vocales à saveur jazz donnant des frissons. Parlant de frissons, Isabelle Boulay n’a pas donné sa place avec sa version de Ne tuons pas la beauté du monde qui lui a valu une ovation mérité. Peu de temps plus tard, Luce Dufault a sidéré avec Je recommence à vivre traitant de la détresse d’une peine d’amour et de sa lente mais tenace guérison. Sa voix écorchée nous prenait aux tripes. Kathleen Fortin l’a succédée avec une prestation sans faille de La différence. Appuyé ça et là par la magnifique chorale Les voix boréales, le spectacle s’est conclu merveilleusement avec Tu trouveras la paix interprétée par toutes dans une harmonie et une chimie frisant la perfection.

En espérant que l’incommensurable et invincible pouvoir de la musique aura trouvé écho dans l’esprit de Renée Claude pour lui apporter le même degré de réconfort que cette douce et sensible soirée unique nous a procuré.

Crédits Photos : Stéphanie Payez, Éklectik Média