Avec Phénix noir, 20th Century Fox effectue une ultime tentative de sauvetage de la franchise X-Men avant que cette dernière rejoigne ses compatriotes de Marvel et Disney. Pour que la saga tire en effet sa révérence avec fracas, Simon Kinberg, qui entame ici sa carrière de réalisateur après avoir scénarisé plusieurs volets de la série, surfe sur la vague dramatique du puissant Logan, mais ça ne s’avère que partiellement réussi en raison d’un script inoffensif et confus.
S’inspirant de l’histoire The Dark Phoenix Saga, le film, à l’affiche dès aujourd’hui, s’attarde sur le personnage de Jean Grey (Sophie Turner de la série Game of thrones) qui ne parvient plus à comprendre et maitriser ses percutants pouvoirs cosmiques de mutante, devenant ainsi un danger autant pour elle-même que pour sa brigade. Cette inévitable et irréversible spirale de violences physiques et psychologiques poussera certains membres dont Mystique (Jennifer Lawrence) et Hank (Nicholas Hoult) à remettre en question les pratiques pédagogiquement nébuleuses du Professeur Charles Xavier (James McAvoy) en plus de réveiller la rage meurtrière de Vuk (Jessica Chastain), une extraterrestre souhaitant exterminer la race humaine pour que la sienne domine.
C’est malheureusement cette sous-intrigue inutile et mal ficelée qui vient assombrir toutes les belles promesses de Phénix noir. On n’accroche tout simplement pas à cette histoire complètement rocambolesque et grotesque même pour une œuvre de science-fiction. Habituellement excellente, Chastain n’arrive pas à déclencher des frissons de terreur dans le dos. Son apparence froide et blême ne suffit pas. On ne croit pas à sa haine. Ses stratégies de manipulation envers Jean tombent à plat et ennuient terriblement.
Kinberg et ses confrères donnent l’impression que les troubles psychologiques et mentaux de Jean Grey ne contenaient pas assez de tensions pour susciter l’intérêt des cinéphiles avides d’action, mais c’est exactement là qu’ils se sont fourvoyés. Les crises d’angoisse de Grey et les éveils de conscience de ses camarades humanisent les personnages et trouvent écho auprès du public qui se voit hélas entrainer dans des mises en situation incomplètes, incohérentes et impertinentes avant de pouvoir s’attacher entièrement.
Évidemment, le film divertit mais cette sensation qu’on aurait pu avoir accès à bien plus d’éléments croustillants flotte tout au long de l’œuvre. On se rabat sur les effets spéciaux spectaculaires qui, sans offrir aucun sens particulier, impressionnent d’un point de vue technique. Les fumées multicolores, les maquillages grandioses, les flammes marquant le visage de Grey, le classicisme dans l’architecture de l’école, l’immensité dense et alléchante de l’espace…Tout cela vaut la peine d’être visionné sur un grand écran.
À travers une réalisation sans originalité, Phénix noir réserve quelques rebondissements efficaces mais ces derniers n’échappent pas à une certaine forme de facilité. La surutilisation de la musique lourde d’Hans Zimmer et ce besoin d’avoir à tout prix un retournement de situation renversant et déchirant atténuent les émotions. Le tout semble tristement plaqué.
La distribution n’en est nullement la cause, bien au contraire. Ce sont le manque d’audace dans le choix des arcs dramatiques qui fait cruellement défaut. Les acteurs ayant à leur actif plus d’un film de la série se débrouillent à merveille, connaissant leur personnage sur le bout des ongles.
James McAvoy continue d’offrir un professeur Xavier complexe dans sa personnalité énigmatique. Jennifer Lawrence apporte une belle maturité à sa Raven finalement en paix avec son identité. C’est une joie de renouer avec le tourmenté Magneto de Michael Fassbender qui chavire le cœur autant dans les scènes touchantes que dans les combats brillamment chorégraphiés. Sophie Turner tire davantage son épingle du jeu dans les séquences de groupe que dans les métamorphoses démoniaques de son personnage où elle surjoue la rage et la peine allègrement.
Bref, l’aventure des X-Men avec Fox s’achève amèrement même si elle a connu d’excellents moments mémorables comme Logan et First Class. Il ne reste qu’à espérer maintenant que The New Mutants nous servira l’intensité émotive et spectaculaire d’un X-Men digne de ce nom.
Ce film prend l’affiche dès le 7 juin 2019.
Crédits Photos : Courtoisie