Une fête d'enfants - TNM

Une fête d’enfants –Le vide des apparences

Une fête d’enfants ouvre la saison hivernale du TNM avec une pièce à tiroirs qui reconstitue un drame fragmenté. Michel Marc Bouchard joue une fois de plus sur ces apparences trompeuses, sous le vernis en surface. En fin observateur du quotidien, le dramaturge explore la complexité des relations humaines. Cette part d’ombre que chacun s’évertue à cacher sous de faux semblants.

Sur scène, Claire accueille les amis de son petit-fils pour célébrer son anniversaire. Le moment s’annonce joyeux jusqu’à l’arrivée d’un couple homoparental magnétique. Papas de deux adorables fillettes, David et Nicolas semblent être un duo parfait, favorisé par la vie. Mais un incident fera voler en éclats leur famille, révélant un bonheur illusoire.

On ne dévoile ici aucun punch, la tragédie étant annoncée dès le début de la pièce. Elle se construit d’ailleurs à rebours, le présent servant à reconstituer le fil des événements. Chaque élément s’imbrique ainsi dans un casse-tête tortueux.

Une fête d'enfants - TNM
© Yves Renaud

UN SUBLIME TRIO 

Une fête d’enfants est portée par un solide trio dont Sylvie Drapeau (Claire), la narratrice qui noue les fils de l’intrigue. L’actrice y incarne une dentiste à la retraite, reconvertie en artiste amatrice. Sorte de bourgeoise sans filtre, son humour caustique apporte une touche de légèreté dans un spectacle souvent anxiogène.

À ses côtés, François Arnaud (David) est aussi séduisant que toxique. Un monstre d’égoïsme mû par un irrésistible besoin de plaire. Le comédien signe un retour gagnant sur les planches dans un rôle taillé sur mesure, après plus de quinze ans d’absence.

Quant à Iannicko N’Doua (Nicolas), il est ce doux conjoint équilibré qui tente de préserver ses proches de la tempête. Méconnu du grand public, l’acteur livre une prestation sensible avec une belle charge émotive.

La pièce repose en grande partie sur des monologues qui mettent en lumière chaque comédien. L’aspect intimiste de l’ensemble s’en trouve renforcée, les répliques s’apparentant davantage à des confidences. Ce choix dramaturgique pourra néanmoins surprendre, la dynamique rompant avec les codes établis.

Une fête d'enfants - TNM
© Yves Renaud

La mise en scène d’Une fête d’enfants repose sur des projections vidéo qui nourrissent la tension jusqu’à son point de rupture. Les images font échos à cette journée maussade entourée de brouillard. Elles s’agencent aussi à l’humeur des personnages dans un effet de clair-obscur.

Après La Nuit où Laurier Gaudreault s’est réveillé, Michel Marc Bouchard revient à un efficace jeu de pistes sur les failles de l’âme humaine. En 1h20, il y expose les vicissitudes de la vie où chacun partage un même destin. L’occasion d’évoquer le désir narcissique, la solitude et le poids du paraître dans un redoutable mécanique tragique. Un miroir brisé dans lequel le spectateur pourra (ou non) contempler son propre reflet.

Une fête d’enfants
Au TNM jusqu’au 12 février
Texte : Michel Marc Bouchard
Mise en scène : Florent Siaud