Dans le cosmos de Virginie Fortin

Hier, au Théâtre Outremont, se tenait la première du one-woman-show de Virginie Fortin intitulé Du bruit dans le cosmos. Nous n’étions inévitablement pas les seuls, bien sûr, à s’être déplacés pour l’occasion : de nombreuses personnalités publiques, à commencer par le père de Virginie, Bernard Fortin, y étaient, fébriles, rendant la salle effervescente. Nous avons pu y croiser d’autres magnifiques visages que l’on connait très bien et qui brillaient par leur présence, ceux d’Édith Cochrane, d’Emmanuel Bilodeau, de Louise Portal, de Sophie Faucher, de Léane Labrèche-Dor et de Catherine Éthier, pour ne nommer que ceux-là.

C’est une Virginie tout à fait confiante et fière qui fit son entrée sur scène, mercredi soir. Elle semblait être dans une forme incroyable, prête, solide, « groundée ». On la sentait, dès les premières minutes, en harmonie avec son spectacle nettement rodé et assumé. ON-AIME-ÇA. Directement arrivée derrière son micro, elle se lança tout de suite dans le vif du sujet en parlant de l’Espace, de l’Univers, de l’énormité ironiquement intangible et non-quantifiable qu’il représente, puis de la peur et du sentiment d’insécurité qu’elle ressent quotidiennement face aux grands mystères qu’il comporte. Elle se livra, nous confiant son inquiétude à l’idée d’être la « seule dans’salle » qui se réveille en pensant à ça, le matin, cette réalité qui nous anime, celle qui veut que nous, Êtres humains, ne soyons rien d’autre, finalement, que de p’tites poussières incomparables au reste du cosmos. Comparant la planète Terre à une cellule, dans laquelle il y a tout un monde, elle ne peut concevoir que, vu de l’extérieur, tel que nous pourrions regarder des bactéries par l’œil d’un microscope, nous puissions imaginer qu’il y ait « quelqu’un en train de se commander un 6 pouces chez Subway ». C’est un public pensif devant tant de philosophie et de théories que l’humoriste et comédienne (Trop., SNL Québec) réussit à suspendre à ses lèvres. Et c’est parfait, car si tu étais la seule’dans salle à penser à ces affaires-là, le matin en te réveillant, Virginie, il y en a une maudite gang qui sont repartis avec tes propos en tête! J’en suis, en tout cas.

Passant du fruit issu de ses recherches sur la NASA (entre autres, une lettre, écrite en anglais  [la langue universelle, bien sûr, c’est évident que les extraterrestres le parlent aussi!] qui a été envoyée dans une sonde en 1977, telle un prodigieux C.V., dans l’éventualité qu’un jour, peut-être, une espèce plus évoluée que la nôtre tombe dessus et ait envie de venir visiter la Terre), voguant vers des faits environnementaux et engagés stipulant que volent en orbite de la planète des millions de déchets. « C’est clair que, si les extraterrestres voient ça, ils nous considèrent comme l’esti d’ermite weird au bout de la rue, tsé, celui qui’a une cour à scrap en arrière d’chez eux », dit-elle, avant d’ajouter en se rongeant les ongles, un ferme « J’ai honte. »

Crédits photos: ©Éric Myre

Tout au long de sa performance, Virginie tente de démystifier et de démêler, voire de clarifier de nombreuses notions et s’évertue, tant bien que mal, à s’imaginer comment nous pourrions les justifier à d’autres civilisations hypothétiques qui ne vivent potentiellement pas (sûrement pas, en fait) de la même façon. Celle de l’argent, par exemple, sujet qu’elle trouve immensément large, d’ailleurs et avec raison : une invention humaine, la pire, ni plus ni moins. Ce faisant, n’étant même pas capable de se l’expliquer à soi, comment pourrions-nous le vulgariser à un être venu d’ailleurs? « Peut-être que les extraterrestres, qu’on imagine être sensiblement faits comme nous, avec des bras, des jambes, des mains… dans l’fond, c’est des p’tits triangles mous », se questionne-t-elle en regardant ses mains mimer la forme géométrique, avant d’extrapoler qu’elle ne se figure pas la manière dont elle pourrait s’y prendre pour expliquer ce qu’est l’argent à un.tri.an.gle.mou. Tout simplement hilarant. Et c’est complètement vrai…

Fortin fait gamberger son public, littéralement. Elle met un stop, le temps d’une soirée, à tout le brouhaha de l’Humain, de ses pensées et de ses préoccupations futiles et individuelles… En fait, le bruit dans le cosmos, c’est nous qui le faisons. Mais, une fois que nous en avons pris conscience, nous pouvons clairement décider de l’arrêter, soit pour s’en reposer, ou pour se concentrer sur des enjeux tellement plus importants que notre propre nombril. Les inégalités sociales, l’importance d’être soi-même malgré le regard des autres, la pauvreté, la mort, la surconsommation, bref, ce qui est plus grand que soi et ce pourquoi, trop souvent, nous n’avons pas de réelles solutions, parce que nous sommes à la fois orgueilleux et angoissés de se croire seuls au monde. Alors que…

Virginie exécuta une finale tout en force, nous ramenant généreusement son Féminazie, sketch qui lui a valu, nous comprenons pourquoi, une nomination au dernier Gala les Olivier. Une chaude ovation lui fut offerte par son public, en retour à sa grande générosité sur scène.

Si vous l’avez manquée au Théâtre Outremont, hier soir, rassurez-vous, vous pourrez vous rattraper au Cabaret le Lion d’Or, puisque la jeune artiste au grand talent a rajouté deux supplémentaires, respectivement les 12 et 13 avril 2019. Cliquez vite ici pour réserver vos places.