Courville

Courville : Robert Lepage ne cesse de nous surprendre

Jeudi soir, au Théâtre du Nouveau Monde, avait lieu la première médiatique d’une autre création de Robert Lepage intitulé Courville. Celle-ci mettait en vedette Olivier Normand dans le rôle de Normand, accompagné de Wellesley Robertson III, Caroline Tanguay et Martin Vaillancourt responsables des allées et venues des marionnettes. 1975 est l’année durant laquelle Normand atteint l’âge de dix-sept ans, c’est l’Année de la Femme, l’année qui précède celles des Olympiques de Montréal, c’est la grosse finale de hockey canado-russe remportée par l’équipe canadienne, un match qualifié du match du siècle. C’est aussi l’année qui précède celle des Élections provinciales. En fait, une année dont tout et chacun se rappelle pour toutes sortes de raisons.

Normand tombe en amour et apprend à connaître et à reconnaître les épisodes de bipolarité de sa jeune amoureuse Sophie. Il perd son père, du moins celui qu’il pense être son père. En fait, une année que l’on peut qualifier de charnière pour l’adolescent. Pas drôle, mais pas drôle du tout pour ce jeune d’être un adolescent en 1975 et en 1976. Tout en vivant son deuil, il doit pratiquement remplacer son père dans sa propre vie. Sa mère ne lui aide pas. Elle le relègue au sous-sol, pour louer sa chambre à son oncle qui est tout sauf probablement un bon oncle. Heureusement, il a son ami Mathieu et aussi Sophie.

© Yves Renaud

La magie de Robert Lepage se reconnaît du commencement à la fin, alors qu’il nous fait visiter la fameuse Chute Montmorency en hiver comme en été, la plage de la roche plate, une piscine olympique, la chambre de Normand, l’appartement de sa mère, la glace du Forum de Montréal, la bibliothèque et le bureau du Notaire Norton le père de Sophie, une petite promenade dans Courville, des sites d’escalade, tout cela sans aucun déplacement de notre part, et sans aucun arrêt de la pièce pour ces différents changements (parfois majeurs) de décors et quels décors, simples, mais complets, où rien n’est laissé au hasard.

On traverse de 1975 à 1976, avec encore des événements, notamment les Olympiques de Montréal, qui nous touchent tous de près ou de loin, l’année où Normand arrivera à sa majorité et les situations majeures auxquelles notre jeune ami aura à faire face ne manqueront pas. Il faut dire qu’Olivier Normand rend très bien le rôle de ce jeune qui doit passer à travers une gamme d’émotions et on peut dire qu’Olivier le fait d’une façon magistrale, à la Robert Lepage, il va sans dire. Un rôle qui selon nous n’était pas facile, avec la complexité des différentes situations avec lesquelles il doit apprendre à vivre le plus naturellement du monde, le plus sincèrement. Il fallait également tenir compte de la présence des marionnettes et leurs manipulateurs.

© Yves Renaud

Quant à ceux-ci, ils sont extraordinaires. Ils ont leur place sur la scène en tant que tels, mais tout en ayant un rôle à jouer, puisque tout en dirigeant les marionnettes, ils personnifient, pour les besoins des dialogues, les différents personnages qui font partie de l’intrigue. Les textes sont tels que tels, on appelle un chat un chat, ou peut-être chaton à l’occasion, mais les sous-entendus sont présents et parfois les démonstrations, n’oublions pas que ce sont des marionnettes, mais tellement naturelles. Il va de soi, que des fous rires, nous avons eu l’occasion d’en avoir, et plutôt plusieurs. L’humour de Robert Lepage est toujours présent, parfois subtil, parfois évident. Des p’tites tunes de l’époque se font entendre à l’occasion, éveillant en chacun des souvenirs.

En fait, Courville nous fait revivre les différentes émotions que l’adolescent a connues ou a appris à connaître en essayant d’y faire face. Une chose qui n’est pas toujours facile. Une pièce qui encore une fois nous fait connaître ou approfondir et apprécier davantage le génie de Monsieur Lepage. Une pièce qu’il ne faut pas manquer. Si vous êtes un fan de Lepage, vous comprendrez pourquoi et si vous en êtes à votre première démonstration de son talent, vous regretterez de ne pas l’avoir vécue plus tôt. La pièce Courville est à l’affiche du TNM jusqu’au 15 octobre et vous pouvez vous procurer des billets ou encore mieux vous y abonner.