The Haunting of Hill House : beaucoup de confettis pour rien

Une maison qui dévore lentement ses occupants. Les bruits de digestions faisant écho sur les murs noircis par la moisissure. Des fantômes arpentant les couloirs à la recherche de quelques âmes à tourmenter. Un cadavre caché par un mur. Les pleurs d’un nouveau-né. Une cabane dans un arbre. Une tasse de thé aux conséquences mortelles.

Le réalisateur Mike Flanagan (Before I Wake (2016), Ouija : Origin of Evil (2016) et Gerald’s Game (2017)), est de retour avec la série The Haunting of Hill House sur Netflix, inspirée du roman éponyme de Shirley Jackson. Agrippez-vous à une boîte de mouchoirs, car il est difficile de retenir ses pleurs devant cette série… et c’est bien ça le problème!

La famille Crain, composée des parents (Olivia et Hugh) et de leurs cinq enfants (Steven, Shirley, Theo, Luke et Nell, s’installe à Hill House dans l’idée de rénover celle-ci et d’ensuite la revendre pour construire leur maison de rêve. Elle découvre très vite qu’Hill House est hantée et que la maison n’a aucune intention de les laisser partir.

La série alterne entre le passé et le présent. Dès le premier épisode, nous apprenons qu’un événement traumatique a eu lieu dans leur enfance, on ne sait pas exactement quoi. Une nuit, Hugh, accompagné des enfants, quitte précipitamment la maison alors qu’Olivia rencontre un destin funeste. Au fil des épisodes, on voit l’état mental d’Olivia se dégrader à travers les yeux de ses enfants. Une vingtaine d’années plus tard, un événement réunit à nouveau la famille.

The Haunting of Hill House est un drame psychologique déguisé en histoire d’horreur. Vous sursauterez une ou deux fois, mais les vrais amateurs du genre seront déçus. Les traumatismes, le deuil et la maladie mentale prennent tour à tour l’apparence de fantômes et visions cauchemardesques. Une sublime métaphore au résultat peu homogène. Durant un instant, le génie de son créateur et le talent de certains acteurs sont indéniables, mais l’instant suivant la production prétentieuse donne la nausée.

Des épisodes vous marqueront plus que d’autres. Tout particulièrement l’épisode cinq, The Bent-Neck Lady, où la descente aux enfers de Nell est tout simplement renversante et sa révélation finale vous coupera le souffle. Malheureusement, il y a plus de la moitié des dix épisodes de la série qui sont dégoulinants de sensiblerie indésirable que le créateur tente de faire passer pour un chef-d’œuvre. On pense ici à l’épisode six, Two Storms, dont les effets de caméras abusifs et les pauvres performances détruisent tout intérêt que l’on a pour l’histoire.

Combien de fois un personnage peut se lancer dans un monologue sans que l’on en soit ennuyé ? Il y a Olivia qui raconte une longue histoire de tempête et de roches tombées du ciel, alors qu’elle ramasse le verre cassé avec Mme Dudley. Son regard se fait lointain, son sourire est perturbant, la performance de l’actrice, Carla Gugino, est parfaite. La caméra ne la lâche pas du regard, tout comme le public, alors qu’elle raconte comment elle a réagi au décès de son père et combien cette tempête, dont elle se croyait responsable, l’a marquée.

Il est dommage que la série abuse de cette technique, car lorsque M. Dudley, incarné par Robert Longstreet, se lance dans un long monologue sur la mort de son premier enfant, le résultat n’est pas le même. Ni lorsque Hugh du présent, interprété par l’acteur Timothy Hutton, raconte comment Nell écrivait au Père Noël chaque année pour demander des cadeaux pour ses frères et sœurs. Ou encore lorsque Theo, interprété par Kate Siegel, explique comment elle ne ressent plus rien depuis qu’elle a touché le corps de Nell. Juste un immense vide rempli de noirceur dans sa poitrine. En tant que spectateur, c’est répétitif et relève de manipulations sentimentales. On tente de faire réagir le public à grand coup d’histoire dramatique et de performances manquant de naturel, mais cela crée l’effet contraire.

Il n’y a aucune constance dans la qualité du jeu des acteurs. On pardonne aisément les faux-semblants des enfants, mais il est plus difficile de faire preuve d’une telle magnanimité auprès des adultes. Certains d’entre eux semblent avoir reçu la directive d’être le plus antipathique possible, et, trop souvent, les événements du passé sont plus intéressants que ceux du présent. Deux acteurs en ressortent sans tache. Carla Gugino, qui interprète avec brio la mère de famille lentement submergée par la folie, et Henry Thomas, qui incarne la version jeune de Hugh, le père soucieux de sauver sa famille alors qu’autour de lui le chaos s’amoncelle pour les engloutir.

Une partie du problème prend origine dans le scénario. Les dialogues sonnent faux. Ils sont trop travaillés. Les acteurs semblent performer sur une scène, comme s’ils étaient seuls à monologuer. Ils ne laissent pas leur interlocuteur participer à la conversation. Ils pourraient s’adresser directement à la caméra et briser le quatrième mur que ça n’en sonnerait pas plus faux. Ce n’est pas sans rappeler une autre série pétrie de bonnes intentions, This Is Us. Chaque épisode a une nouvelle prouesse de chantage émotionnelle, où tous les éléments sont présents pour pousser le public à vivre des émotions, mais rien ne justifie celle-ci. Si vous avez des larmes aux yeux ou la gorge nouée, ce ne sera pas parce que vous avez trouvé les personnages attachants. L’hypocrisie de Shirley, incarnée par Elizabeth Reaser, et Steven, interprété par Michiel Huisman, par rapport aux problèmes mentaux des jumeaux, vous poussera à souhaiter qu’Hill House réussisse à les tuer.

Au tout dernier épisode, Nell rappelle à ses frères et sœurs que le plus important est la famille et l’amour qui les unit. « Tout le reste n’est que confettis. », conclut-elle. Il est ironique de l’entendre quand on réalise combien la série repose sur des artifices. Malgré certains moments qui vous donneront la frousse, l’homme au chapeau melon et la femme au cou tordu, The Haunting of Hill House ne réalise jamais son plein potentiel et se contente d’abuser de l’empathie du public.

Une deuxième saison est prévue pour 2020 sur Netflix et sera basée sur le livre de Henry James, The Turn of the Screw.

The Haunting of Hill House est disponible en DVD et Blu-ray au Québec depuis le 15 octobre.

Crédits Photos : Internet Movie Database

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